Le Brexit
ça excite
Suite à un referendum en bonne et due forme
où les Europhobes l’ont emporté sur les Europhiles, la Grande Bretagne, dit
adieu à la Communauté Européenne, qu’elle avait intégrée en 1973, après moult
hésitations et calcul pernicieux. Dans un discours historique datant de 1963 et
conservé par l’INA, Charles de Gaulle n’avait pas caché ses réticences envers
le pays qui durant la deuxième Guerre Mondiale, lui avait assuré l’exil sécurisé
et l’avait aidé à organiser la résistance contre les Nazis. Dans son
argumentaire, de Gaulle considérait que les clivages entre les continentaux, comme
la France et l’Allemagne et puis les autres entités insulaires comme
l’Angleterre rendaient cette adhésion aléatoire. Le refus était catégorique et
sans équivoque. Il a fallu attendre l’arrivée de George Pompidou et l’aval des
autres chefs d’Etat pour que quatre pays rejoignent la CEE dont le Royaume Uni. On passa de six
membres à 10.
Si en juin 2016 les Eurosceptiques ont dominé
en imposant le Brexit, cela signifie qu’un nouvel état d’esprit est entrain de
se propager au sein de la GB. La fracture au sein d’une entité qui paraissait
soudée à jamais pourrait conduire au pire comme au meilleur. Ça dépend de l’alternative.
En effet, si la sortie garantirait une relance positive par rapport au passé,
on en déduirait sa bonne véracité. En cas d’échec, il faudrait accepter la
fatalité sans regret.
Un referendum lourd de conséquences et un
signal d’alarme, tel pourrait-on schématiser pour économiser les mots. Ce Brexit
historique pourrait engendrer par
contagion d’autres ’’Exit’’ plus retentissants et décisifs au sein de ce grand
marché commun, gagné depuis belle lurette par le doute.
Il ne s’agit pas d’un petit Etat qui bat de
l’aile, mais d’un ex-empire colonial dont on disait à une certaine époque, que
le soleil ne s’y couchait jamais et qu’il jouit toujours d’une place
prépondérante au sein de l’ONU ? l’OCDE, l’Otan, le FMI et du Commonwealth.
Il possède la première langue au monde et il est un allié sûr des USA.
Ce qui est à la fois débonnaire et
spectaculaire dans ce grand revirement, c’est que c’est le peuple qui le décide
et non les technocrates cravatés qui le représentent à Bruxelles. Cela prouve
que quand il s’agit de la destinée de la nation, on doit toujours se référer au
peuple. Les Anglais ont encore une fois donné au reste du monde une leçon de
démocratie et de transparence. Le vote s’est déroulé sans bavures et dans les
normes requises. Pas de trafic ni dans les urnes, ni dans le compte des voix. Les
millions de tweets qui ont précédé ce vote décisif et historique, on les doit à
l’outil Internet qui est désormais au cœur de tous les changements du nouveau millénaire.
On peut y échanger autant d’idées farfelues que révolutionnaires.
La leçon british risque de faire tache
d’huile dans un monde en crise. Les oligarchies du tiers-monde qui imposent
leurs desideratas aux peuples qu’ils
gouvernent par la force doivent méditer cette belle leçon de civisme politique. Vaincu, David Cameron
qui était pour le maintien a essuyée la défaite avec fair-play. Il annonce qu’il
va démissionner.
En sortant du club des 28, la GB a ébranlé
pas mal de convictions à l’emporte-pièce et de schémas préétablis. Les Britanniques
sont de plus en plus intéressés par le leadership. Ils savent qu’en évinçant
les monnaies locales, l’Euro n’a apporté que les tracas pour les petits pays
qui n’y étaient pas suffisamment préparés. La Grèce fut une des premières victimes
de ce lifting. L’Espagne a failli succomber au chaos.
Pourquoi ces fissures et ces signes de
faiblesses, alors qu’on disait prosaïquement : «l’union fait la
force» ? Parce que les économies
des pays engagés ne sont pas uniformément immunisées contre l’inflation
unioniste. Les citoyens de cette Europe unifiée n’ont pas tous des revenus
élevés, pour ne pas sentir le poids fiscal ? Rappelons qu’après la divulgation des fameux
Panama-Papers, on a vu que même les plus argentés de la planète cherchent à
éviter le fisc local en allant cacher leur fortune dans les paradis fiscaux.
Que dire d’un smicard ou d’un chômeur ou d’un retraité ?
La question migratoire est au cœur du débat
avec ses incidences et contingences sécuritaires au sein d’un espace communautaire
que la porosité frontalière a rendu plus fragile. Suite aux derniers actes
terroristes qui ont endeuillé Paris et Bruxelles, on sait que parmi les
migrants, il y a des malintentionnés qui
n’attendent que le moment propice pour répéter les mêmes hécatombes. Mieux vaut
faire barrière que les laisser pénétrer
le territoire pour le dynamiter de l’intérieur.
Ainsi, montant à nouveau au créneau, un
ancien chef d’Etat européen à ne pas nommer en appelle à un retour aux anciens
tracés frontaliers avec les multiples contrôles de douane que cela préconise. En
d’autres termes, il veut abroger l’une des clauses les plus fondamentales du
traité : celle de la libre circulation. Si de telles perspectives se
réalisaient, l’union deviendrait superficielle. Elle s’ouvrirait plus aux
dissidences qu’aux nouvelles adhésions. Le retour au droit de regard sur les affaires des voyageurs déplairait à
plus d’un.
De toute évidence, la sortie de la BG du
club européen aura des répercussions dont seul, l’avenir connaîtrait l’ampleur et les dégâts. Les pessimistes
disent qu’après cet imprévisible séisme l’onde de choc va inéluctablement gagner
d’autres pays n’ayant récolté de cette union que les tracasseries. Ils mettent
en cause l’intransigeance de Bruxelles sur certaines questions fondamentales. Submergée
par les vagues de migrants paupérisées, la Pologne veut fermer ses frontières, pour
endiguer le flux, mais Bruxelles lui dit non.
Signalons tout de même qu’au sein de ce
grand marché, il n’y a pas que les perdants. Le pays qui a profité au maximum
de cette union est le pays que la Société a des Nations a démilitarisé après la
capitulation de 1945, à savoir l’Allemagne. Mais il faut reconnaître aussi que
ce brillant élève de la classe doit son
essor à son savoir-faire et à son sérieux. Actuellement, c’est lui qui détient
le leadership au sein de cette vieille Europe. La réunification des deux Allemagnes,
autrefois irréductibles ennemies, fut un atout de croissance et d’apogée qui
fait des envieux.
Autre signe de confiance retrouvée, cet
Etat dispose d’assez de largesses pour accueillir plus d’un million
d’émigrants. Les réfugiés syriens en font partie. Cela prouve qu’il n’a pas les
mêmes contraintes que ses voisins, où un certain protectionnisme racial et
économique pointe du nez.
Quel serait le sort de l’Irlande du nord et
de l’Ecosse ? Quel avenir pour
l'Europe sans la GB ? L’inconnu tonne et résonne bruyamment plus que le connu,
dans cette situation inédite, rendue plus dramatique par son aspect irréversible.
En effet, même si la GB se rétracte et revient sur sa décision, ce qui est improbable,
la re-adhésion lui sera refusée.
En attendant la suite des événements, les
’’28 moins1’’ doivent s’atteler à colmater les brèches et faire preuve de
malléabilité, car après tout, ’’In’’ ou ’’Out’’
la GB reste un partenaire fiable. Ce qui est arrivé, c’est que les Britanniques
veulent garder pour eux les 350 millions
de livres sterlings (estimations du parti europhobe UKIP) fournis comme contribution hebdomadaire, afin de les
injecter dans les services de la sécurité sociale. Lequel système de santé reste un des meilleurs si l’on croit les
experts, interviewés par Michael Moore pour son film documentaire Sicko, nominé
à Cannes en 2007).
Il y a beaucoup de changement en l’air. Le
monde n’est plus ce qu’il était. Tout se passe vite. Les quiétudes décennales
cèdent la place aux inquiétudes instantanées. C’est l’exercice de la démocratie
qui en est le froment et l’agitateur.
RAZAK
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