Monday, September 26, 2011

Le système audiovisuel marocain entre juxtaposition et opposition


Quel aura été l’impact du soi-disant colloque (organisé le 23 et 24 septembre 2011 dans un palace de Rabat rêvant de tulipes d’or) sur l’audiovisuel public. Ce thème intéresse tous les marocains, étant donné que ces derniers sont acculés à payer, à travers une honteuse redevance, imposée et défalquée à la source, les pots cassés d’une politique audiovisuelle vacillante et trébuchante. Ce qui devrait être débattu sur la place publique, on le fait en catimini, comme si on craignait l’ire des contribuables avisés ou l’intrusion des militants du mouvement du 20 février. L’affiche laisse à désirer. Elle ressemble à un encart publicitaire d’une école privée avec en sus des caractères d’imprimerie d’une illisibilité criarde. Il semble que ce camouflage est voulu et prémédité astucieusement pour éviter d’une part le sur-attroupement des curieux et d’autre part empêcher l’interaction de voix dissidentes. Ce sectarisme castrateur contraste négativement avec l’idée de colloque ou de symposium. La documentation distribuée aux participants est pleine de quiproquos. Le plus saillant concerne le thème choisi lui même. En effet, s’agit-il de «colloque» comme il est mentionné sur la feuille syndicale ou de «séances de dialogue professionnel» comme il est indiqué en caractères gras sur la feuille parlant au nom de l’assemblage contre-nature d’une société privée et du holding de service public. Le sous-titre nous laisse perplexe. Sa traduction donne quelque chose comme ceci: «Pour une politique rédactionnelle et médiatique concertée». Comment peut-on parler de concertation avec des responsables qui considèrent la liberté de ton comme une insubordination ? La juxtaposition bureaucratique est toujours en vigueur, alors qu’avec les effervescences sociétales en cours, il faudrait tolérer un peu de critique et d’opposition pour que les marocains soient ravis de leur téloche. La liste des refusés et des proscrits ne cesse de s’allonger et le cocktail syndical impliqué dans l’organisation (sans celui de la presse) considère cette rencontre avec les chefs hiérarchiques dans un palace équipé de data-show et en présence de quelques invités choisis minutieusement comme un acquis. A-t-on besoin d’un hôtel pour que cette audience entre dirigeants et subordonnés ait lieu?
«C’est votre cuisine interne. Le peuple ne veut ni colloque, ni Saikouk mais un audit sérieux des rouages», ainsi rétorquerait tout citoyen consciencieux et soucieux de la sauvegarde des deniers publics en les préservant de la gabegie dépravatrice. Trop de directeurs surpayés pour un résultat mitigé. Foisonnements de chaînes avec un impact audimétrique proche du zéro. Reprise de fonction par des retraités qui ont été copieusement indemnisés dans le cadre de ce qu’on appelle Départ Volontaire et qui reviennent débiter le même verbiage. Sachant que le texte de loi régissant ce type de retraite anticipée interdit formellement de telles bavures. N’est-ce pas de l’enfantillage administratif ? Si ces compétences sont toujours valables, alors pourquoi avoir anticipé leur retraite en leur accordant une prime alléchante?
Toutes ces sur-fonctionnalités budgétivores doivent cesser pour de bon. Et ce n’est pas une estrade d’oralité pleine de complaisance qui va en freiner l’effusion budgétaire. Personne n’a évoqué ces questions essentielles qui sont la cause principale des dysfonctionnements et la source du dénigrement populaire. Dans la presse écrite les critiques fusent de toutes parts et pour tenter de les juguler on essaie de jeter de la poudre scintillante aux yeux en improvisant un simulacre de colloque-maison.
Certains lecteurs peuvent s’en souvenir, il y a plus de 20 ans, on avait intitulé une chronique: «Colloque, colloque ce devient une colique». On en était à un dictionnaire de recommandations jetées en l’air. Aujourd’hui les choses ont empiré. Jamais téloche de service publique n’a reçu autant de flèches de désapprobation, mais pour tenter de les désorienter on a concocté un mini séminaire d’auto-glorification. Comme le dit l'adage: On n'est mieux servi que par soi-même.
RAZAK

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