Les Mesfioui (habitants de Safi) sont
sortis par centaines dans la rue pour crier leur ras-le-bol. «Safi n’est pas
une poubelle», ainsi, lit-on sur le
tee-shirt d’une fillette portant un morceau de tissu en guise de masque à gaz.
Cette image symbolique a circulé à
travers les réseaux sociaux. Décryptage: c’est de la génération montante que
dépend l’avenir écologique du pays. Comme à l’accoutumée, les politiciens
affilés aux partis sont les derniers à réagir. L’un de ces partis se dit
écologique, sans toutefois le prouver. Ses ’’vaillants’’ militants jouent aux
abonnés absents, alors que la lointaine Greenpeace entre en ligne pour rappeler
aux responsables marocains certains engagements que le pays a signés en matière
de préservation de l’écosystème. Le ministère de la santé publique où un
verbeux ministre se voit sur tous les fronts étonne par son silence
complice.
Depuis le 24 juin, jour où le cargo
provenant d’Italie a accosté au port industriel Jorf Lasfar, avec sa cargaison
nauséabonde, la grogne grandissait de jour en jour, au sein d’une population
qui se croit lésée, dévalorisée et trahie dans son rêve de prospérité. Chômage, pauvreté,
désœuvrement et oisiveté juvénile, brefs tous les ingrédients d’une situation
explosive. Ces déchets industriels ont réveillé l’ogre qui sommeillait. Les
internautes éveillés ont expliqué aux profanes les conséquences prévisibles de
cette invasion de déchets toxiques, dont on s’échine plus haut à nier la
dangerosité, alors qu’ils constituent une véritable bombe écologique à
retardement. Les maudits rejets italiens en sont la mèche et l’étincelle.
L’implication d’une société israélienne de transport maritime ( Zim Integrated
Shipping) dans l’acheminement des
containers a ajouté une braise ardente à cette brûlante affaire, où l’usage du
faux et l’abus de pouvoir s’interpénètrent insidieusement et de manière
maffieuse. La cimenterie qui accueille ces déchets appartient à des
intouchables au sens despotique du terme. C’est pour cela que la soi-disant police
environnementale a fait profil bas. Elle n’a même pas pu retenir le cargo au
port pour faciliter l’enquête. Ainsi, pour éviter une tension sociale dont le
Maroc n’a pas besoin en ce moment, on donna enfin l’aval au gouvernement pour
trouver une issue à cette scabreuse affaire.
Au début, les officiels disaient que cette cargaison est utile et ne présente
aucun danger, mais telles des girouettes, ils se rétractent en confirmant qu’il
y a anguille sous roche. On a eu l’outrecuidance d’affirmer publiquement et
sans rougir de honte, ce que les experts en la matière récusent énergiquement.
Dire que ces déchets ne sont dangereux et tralala... C’est un mensonge d’État. Si c’est tellement
propre, pourquoi les Italiens paieront de l’argent pour s’en débarrasser. Stockés ou brûlés, ces
déchets sont très nuisibles. Dans le premier cas, on pollue la nappe phréatique
par infiltration interstitielle et dans le second, on empoisonne l’air qu’on
respire, car les fumées qui se dégagent
des cheminées sont chargées de métaux
lourds (plomb, cadmium, titane…) et de dioxines qui provoquent le cancer et un tas d’anomalies tant
bio-physiologiques qu’hormonales. Les
filtres susceptibles de réduire de la nocivité de ces fumées coûtent très
cher. Il n’y a pas une cimenterie au Maroc qui en soit équipée.
Cet acte irréfléchi orchestré au plus haut
niveau et cautionné par un ministère laxiste a été perçu par les habitants de
cette région comme une insulte, un acte
provocateur. De Safi, la contestation pourrait gagner d’autres villes
comme El Jadida et Settat, étant donné qu’elles sont exposées aux mêmes
émanations chimiques des incinérateurs. Les cimenteries ont tapissé la carte du
pays. Même Casablanca n’est pas à l’abri. La zone limitrophe Bouskoura où se
trouve une grande cimenterie est déjà sous l’emprise des rejets industriels.
Les riverains se plaignent d’un tas de maladies.
Au niveau politique, le parti islamique qui
dirige théoriquement le pays est dans de
mauvais draps. Rappelons qu’en 1915, ce gouvernement de barbus a abrogé (via un décret mal
instruit) un texte de loi qui interdisait de telles transactions frauduleuses.
Ce qui est arrivé aujourd’hui est la conséquence directe de cette abrogation
mal pensée. On aurait dû s’aligner aux Européens qui ont une vision claire et
bien définie. On ne badine pas avec
l’environnement à l’écosystème. Ils sont sacrés. Malheureusement, c’est
au nom du sacré que tout est massacré au pays du fqih Benkirane.
Un vrai coup de traître et une gaffe
politique impardonnable. Seuls les fous et les écervelés peuvent accepter un
tel deal. Une poignée d’Euros contre des milliers de tonnes de déchets
hautement toxiques, nuisibles à l’environnement et à la santé des humains
Ces politiciens à la con prennent les
Marocains pour des cobayes, juste bons aux mauvaises expérimentations et au
sacrifice, comme si les souris déjà existantes en surnombre s’étaient envolées
vers une autre planète.
Ce qui est à la fois contradictoire et
comique dans cette scandaleuse affaire, c’est qu’elle éclate dans la phase
préparatoire du COP22 dont la tenue est
prévue au Maroc en novembre prochain . Ça ressemble à du sabotage d’anticipation.
Mais derrière tout acte criminel, il y a une tête diabolique qui manigance
tout. Il faut la trouver parmi les dizaines de têtes dociles qui la suivent
aveuglement. Insidieuse, maléfique et revancharde, elle voudrait faire des
rejets industriels un colis piégé, quitte à bousculer la politique interne du pays (Qu’est ce qui empêche de dissimuler
des armes dans les colis ?).
Le choix de la région à été méticuleusement manigancé. Si on avait choisi
Rabat, la capitale du pays, cette transaction aurait été perçue comme une
conspiration. Tanger c’est plus proche de l’Europe. Cela pourrait entraîner de
lourdes sanctions. Mais l’ouest marocain est plus sûr et l’appât est
considérable: Abda c’est la première poissonnerie du pays, la Chaouia en
est le grenier et Doukkala son verger.
S’attaquer à ces espaces vitaux, c’est chercher à déstabiliser le pays. Les
Portugais de jadis ont essayé le même stratagème, mais historiquement, leur
présence n’a pas fait long feu.
Maintenant que le masque est tombé, va-t-on
juger les trafiquants et les officiels qui leur ont tracé le chemin? Une question qui risque de rester en en suspend, car il n’y a pas assez de transparence et d’indépendance
pour que la justice aille jusqu’au bout. Cependant, les habitants de la région
ont pris conscience des dangers. Un deuxième cargo les mettrait en furie et
gare aux frivoles du ministère de l’environnement qui jonglent avec le feu.
Quand un affamé de justice se révolte, il voit rouge.
Décidément, ce scandale nous rappelle par
bien de similitudes l’offshoring frauduleux que les Panama Papers ont mis a nu
(lire notre chroniquer Lien URL http://razakcinema.blogspot.com/2016/05/lor-fane-de-loffshore-et-le-cinema-2eme.html
) . Il n’y a pas que la devise forte à prendre le raccourci des paradis
fiscaux, il y a des déchets industriels
et domestiques qui cherchent les ’’paradis toxiques’’.
RAZAK