Grâce au covid-19 dont la recrudescence de virulence s’annonce
létale pour les deux saisons à venir, c’est-à-dire
l’automne et l’hiver, les gens ont enfin compris la différence entre
vivre et survivre. Avec les privations en série où la liberté perd tout
attribut sémantique la ligne de démarcation entre ces deux verbes
s’approchant asymptotiquement des verbes d’état est devenue plus saillante et
plus barbante. Muselières aux becs, la peur aux
tripes, distanciation sociale en vigueur manu militari, la mal-vie
devient nébuleuse et chagrinante. Du confinement au couvre-feu, la morbidité
prend la voie ascendante. L’impératif périlleux, imposé par les
circonstances atténuantes et exténuantes du corona, et puis la crainte d’une
contagion généralisée ont engendré une psychose, que l’on pourrait
appeler « psy-covid », sans risque d’être
contrarié. Cela résulte du cumul interrompu du corona stress. Il y a eu des
suicides inutiles, des décisions virevoltantes et comme disent les
philosophes éclairés : « les choses se reconnaissent à leur
finalité ». L’an 2020 nous en réserve de plus surprenantes. Il
n’est pas encore terminé, hélas.
Bien qui rira le dernier, l’adage
s’applique au covid-19. Ceux qui se croyaient épargnés par la
pandémie ont reçu le cout de fouet tardivement. Le président brésilien l’a
appris à ses dépends, tardivement évidemment. Victime de son
populisme exacerbé, il se rétracte dans la honte.
Désormais, la nouvelle thérapie à la sauce covidienne
, révisée et corrigée par le stress sera : « apprendre à vivre
seul avec le minimum de victuailles et ne parler à autrui qu’en cas
d’extrême urgence » . Les pauvres vont droit au mouroir. Les casaniers et
les solitaires innés trouveront ce mode de vie à leur convenance, tandis que
les Zorba et les hédonistes n’auront qu’à souffrir en bal masqué, pour
sédentaires.
Revenons au verbe vivre et à son oxymore. Ce sont les
arts de divertissement, les règles de civilité, les voyages, les découvertes et
les contacts édifiants avec d’autres peuplades de la terre qui
donnent au verbe vivre un surplus de glamour, de boniments et de
sublimations.
Avions cloués au sol, palaces et hôtels vides, théâtres
et salles de cinéma fermés, galeries d’art cédant au vent de panique, plages et
piscines interdites, activités festivalières interrompues brusquement ou
ajournées à une date ultérieure, festivités mondaines rayées de la
carte sociétale, lieux de plaisance , de détente et de distraction renouant avec
la tristesse et puis touring touristique hors-circuit, on ne
sait pas par quel labyrinthe le plaisir pourrait s’immiscer, pour
défaire notre bestialité.
Manger à sa faim et désaltérer sa soif, concernent la
survie. Vivre transcende la survie. Bref, ce sont les plaisirs
qui prolongent le goût de vivre et lui donnent de la couleur. Leur
disparition accentue la morosité et aiguise l’absurdité
ambiante.
RAZAK
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