Monday, December 10, 2012

Les FAFM du FIFM




«Pauvre riche FIFM»: il n’y a pas meilleur oxymore que celui-ci, pour entamer cette chronique de synthèse. Pourquoi pauvre riche? La pauvreté réside dans l’esprit de certains protagonistes, qui ne veulent pas évoluer. La richesse se trouve dans les liasses des subvenions allouées, tant pour son fonctionnement, que pour son rayonnement. A la misère des idées, s’ajoutent  les aléas climatiques, qui cette année, ont eu de l’incidence en  perturbant son déroulement naturel. Le mois de décembre n’est pas  le mois idoine, pour la tenue de cette manifestation cinématographique qui rêve d’une gloire impossible. Ce n’est pas la première fois qu’on le dit, de cette manifestation qui  pourtant étant prédisposée, dès son lancement, à un avenir bien meilleur. Un froid sibérien, venant des cimes du Grand Atlas, a submergé la ville  où il s’est tenu.

Ainsi, si l’on croit les paroles d’un des vice-présidents, 6 milliards seraient engloutis dans l’organisation de cette manifestation. Si on m’avait accordé le droit de parole, à l’instar des autres chroniqueurs culturels accrédités, j’aurais demandé plus de détails sur les chiffres avancés. Est-ce que les billets  de la RAM sont inclus ou non?  Un billet  aller-retour Mumbai-Marrakech couterait l’équivalent de six nuitées dans un grand palace. Le transfert des bagages coûtent cher dans le transport aérien. Les  observateurs avertis pensent que la facture réelle du 12e FIFM en serait au double. Soit, admettons que ce ne soit pas un mensonge d’Etat (lire Dérida) et que  le patron du CCM dise la vérité, la sommation des autres factures (12 éditions) donnerait un chiffre ahurissant, qui ferait frémir et frissonner même les endurcis de la race humaine. De grandes  ressources mobilisées, sans pour autant, parvenir à des résultats probants. 12 éditions se sont écoulées, mais le film marocain est toujours out. Cela prouve que notre filmographie n’est pas au niveau. Qui est le responsable de cette situation désastreuse? 
En tout cas, bravo au jury. On avait pensé qu’on allait soudoyer ses membres pour déroger à la règle et donner crédit à un navet issu de notre pauvre pépinière. Le «Zéro» de Lakhmari doit son rejet aux dialogues mal écrits et à la redondance de certaines scènes. Ayouch  se perd dans le «trop-suggestif» dont il a usé dans son dernier film en compétition. Cela nous replonge à nouveau dans  la problématique de la rareté des vrais  scénaristes au Maroc. Ceux qui s’y connaissent se comptent sur les doigts d’une seule main et ils sont marginalisés  parce qu’ils ont osé critiquer les gestionnaires du secteur.

La ville de Marrakech manque d’urinoirs et d’infrastructures socioculturelles de base, mais on continue à dilapider les deniers publics, de manière hautaine , arrogante et provocatrice. Figurez-vous qu’à Marrakech les touristes trouvent des difficultés à soulager leur vessie,  puisque les urinoirs à Guéliz sont pratiquement inexistants et les Chleuhs des cafés sont atteints par cette fâcheuse habitude de cadenasser les sanitaires. Si on avait consacré, ne serait-ce  que 10 %  des milliards dépensés, au WC  de la ville ocre, on aurait fait d’une pierre deux coups. Ainsi, quand le FIFM a démonté ses lourds échafaudages et ses grands projecteurs, gros bouffeurs de kilowatts, les clochards, les  oisifs et les désœuvrés, chassés pendant le festival, ont repris leur place habituelle. Comme je suis resté deux jours après la fin des dites «festivités», pour éviter l’encombrement du train, je fus assailli par une horde de vagabonds, à quelques pas de l’hôtel où je résidais. Si je n’avais pas froncé les sourcils et haussé le ton, on m’aurait dépouillé en plein-jour. Les mendiants, avec toutes les misères du monde, se sont remis à importuner les touristes, notamment ceux qui veulent prendre  leur lunch à la terrasse.

Revenons au FIFM pour parler de ses FAFM, c’est-à-dire: ses  Fautes, Anomalies, Futilités et Maladresses. Le célèbre acteur égyptien Nour Echerif en a révélé quelques unes. Ainsi, contrairement à la «trop-revenante» Yousra, Echerif a eu l’audace de dire le non-dit. Il s’est plaint du «luxe inhospitalier» et impopulaire dans lequel on l’avait largué. La tour d’ivoire, où on a placé les hôtes les plus en vue, commence à agacer. Je suis sûr que  Nour Echerif serait contenté d’une petite chambrette, équipée du juste nécessaire, si celle-ci se trouvait à proximité des salles de projection. Cet acteur qui ne jongle pas avec les mots  voulait parler aux cinéphiles marocains, aux journalistes et aux critiques de cinéma, mais on a dressé des barrières entre lui et ces derniers. Tout cela est une fabrication française, étant donné que la paternité de l’idée du festival reviendrait à Toscan Duplantier. Après sa mort, sa femme en a pris les rennes. Les Marocains se chargent de la logistique et assurent le financement. Mais les invités ne sont pas accueillis  de la  même manière. Qui mérite l’emblème  du FIFM Amitabh Bachchan ou Catherine Deneuve, qui malgré le respect que j’ai pour elle, n’est plus neuve?  Les Indous, dont on dit qu’on les avait bien accueillis, n’étaient pas eux aussi ravis de cette «réclusion bourgeoise» et de ce «Glass-house» sous haute surveillance, eux qui dans leur pays natal se sont habitués à des festivités plus ouvertes et délassantes à l’extrême. Il n’y a qu’à voir les Filmfare et les IIFA-Awards sur Youtube, pour en avoir une idée.

Pauvre Mamounia, le palace en a, lui aussi et sans le vouloir, pris un sacré coup d’impopularité. Les festivaliers de deuxième et dernière classe ne pouvaient pas y entrer. Durant les 9 jours du FIFM, il se transforme en un arrondissement, en perdant ses attributs hôteliers et hospitaliers. 3 vigiles au regard pestillent par mètre carré. Une telle densité fait peur, sans oublier les dizaines de  «caméras-live» qui enregistrent même les hoquets, les toux et les soupirs des gens.
RAZAK

(La suite dans le prochain post)

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