Tuesday, November 28, 2017

Ciné-tournages nuisibles Par RAZAK .( journal L'Opinion)




Ciné-tournages nuisibles
Par RAZAK

Dans le film « Allan Qurtermain et la cité de l’or perdu » de Gary Nelson, l’acteur marocain Larbi Doghmi porte de longues cornes et se vêtit en homme de caverne. Il casse des pierres avec sa tête. Dans « Body of lies » du revenant Ridley Scott, qui, durant le tournage à Rabat et à Salé avait bénéficié de facilités exceptionnelles, on découvre une image dégradante, tant du Maroc que des Marocains. Dans une séquence de ce film d’espionnage anti-arabe, un des protagonistes principaux dit à son compagnon : « nous voilà retournés à la civilisation ». Il parle des États-Unis évidemment. Dans le film de Dick Richards « Il était une fois …la légion » on décrit les berbères comme des Amérindiens, c’est-à-dire des Apaches. Par bonheur ou par damnation, ces deux films tournés au Maroc n’ont pas marché au box-office. Il sont passés inaperçus. Il n’en reste que le geste de trahison. Il en est de même pour d’autres superproductions américaines ayant reçu l’aval du CCM. On trouve les mêmes clichés dévalorisants et les mêmes inepties. Les responsables qui se sont succédés à la tête de ce centre de cinématographie, si décrié par la critique intègre ne pensent qu’à l’argent. Après la fermeture tragique des salles de cinéma et la réduction dramatique du nombre annuel d’entrées, (un déclin dont le centre endosse la responsabilité), on focalise maintenant sur les tournages étrangers où la concurrence est devenue très sévère. Ces tournages ne sont pas tous « clean » et irréprochables. Il y en a de plus décevants et de plus provoquants. Le cinéma de l’honneur tarde à apparaitre, puisque, malgré le honteux traitement imagé que l’on réserve aux habitants de ce pays à la civilisation millénaire, tous les tournages qui ont été refusés dans d’autres pays trouvent bon accueil au Maroc, comme si on avait affaire à des apatrides, sans passé et sans avenir. On oublie qu’avant l’art, il y a la dignité. L’honneur et l’amour-propre passent avant toute chose. On est pour l’ouverture, mais pas pour l’insulte. Ces seconds-rôles qui nuisent à la réputation du Maroc, sont pires que les attentats terroristes commis par des originaires de ce pays paradoxal, qui accueille bien les étrangers et néglige ceux qui y sont nés. La puissance de l’image est indétournable. Préoccupée plus par les festivals budgétivores et inutiles que par la bonne gestion des affaires cinématographiques, cette institution publique n’a trouvé comme ultime subterfuge pour sauver la face, que de consacrer une part du fonds d’aide destiné initialement aux Marocains, aux tournages étrangers, comme si les producteurs américains et autres en avaient besoin. Il y a de quoi se flinguer.
Les critiques intègres avaient beau signaler, à bon escient, les dérapages et dysfonctionnements du centre de ’’masticage et de cérémonies’’ (titre d’une ancienne chronique humoristique), en vain. On les prenait pour des rabat-joie invétérés, qui aboyaient sur une caravane immobile.
Les films étrangers tournés au Maroc et qui véhiculent une image négative de ses habitants sont légion. Avec leurs titres on peut constituer un annuaire. Les Mexicains, quant à eux, avaient fait preuve d’une vigilance remarquable, en imposant aux gringos américains certaines restrictions préalables, dans le but de préserver leur dignité. Pour le tournage du film ’’ Les Sept Mercenaires ’’, ( version western du film culte ’’Les Sept Samouraïs’’ de Kurosawa ) ils avaient dû rectifier de nombreuses pages du scénario initial. Est-ce que le CCM pourrait imposer ce « droit de regard » aux faiseurs d’image étrangers, dont on sait qu’une bonne partie est mal intentionnée ? Il faut beaucoup de bravoure pour vaincre la cupidité. Cela risque de faire fuir les « pris au piège ». Donc pas de sursaut salutaire à attendre de ce branle-bas juridico-économique, incongru et bizarroïde.
Dans un pays où tout semble galvaudé à outrance, il faut s’attendre à toutes les monstruosités imaginables, car malgré les décennies écoulées, de tâtonnement et d’errance cinématographique, on n’a pas trouvé « the right man for the right place ». Une de ces monstruosités qui vexent l’œil et l’ouïe s’appelle (tenez-vous bien) « festival international du film de femmes de Salé ». Nous sommes les seuls à inventer de tels sobriquets langagiers. « Film de femmes de Salé », cette difformité sémantique provoque le fou rire. Comme si les longs métrages que l’on projetait ne comportaient, de A à Z, et exclusivement, que des femmes, du caméraman au chef monteur, en passant par les autres collaborateurs de création cinématographique (accessoiristes, ingénieur de son, perchman, …). Bref, un film où tout est 100 % féminin n’est pas cinématographique, il est soit pornographique, soit ségrégationniste et un festival qui se base sur de tels simulacres propagandistes ne sert ni le 7e art, ni la culture qu’il est sensé animer.

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