Friday, March 01, 2019

De l’Art transcendantal aux Haïkus picturaux Regard sur un livre d’art Par RAZAK (29ème partie


Les journalistes « ménopausés » qui, par stérilité intellectuelle, ne produisent que du vide autour d’eux sont faciles à manipuler et à asservir. Normalement, ils devraient  être licenciés, si le respect de la déontologie était primordial. Mais d’autres calculs pernicieux entrent en  jeu, pour compliquer l’équation. Financièrement parlant, le licenciement de ces vauriens coûte plus cher que leur maintien dans la rédaction. On attend que l’âge fasse le ménage, tout naturellement, sans remous et sans bruit. Arrivée à terme, la rupture dans de telles circonstances parait salvatrice, car on arrive à se débarrasser d’un bras cassé que les circonstances exténuantes ont rendu indéboulonnable. Mais la problématique reste entière et barbante. Comment assurer la relève avec des éléments compétents et honnêtes ? L’institut forme des bureaucrates et les meilleurs journalistes que ce pays a enfantés n’ont pas fait d’institut. C’est le militantisme de gauche qui les a révélés au public. Le malheur, c’est que bon nombre de ces intellectuels ont soit quitté ce monde, soit changé le fusil d’épaule. Il ne reste que  les frileux carriéristes, adeptes du « politiquement correct ». Ils évitent les sujets hard et se laissent entraîner par le soft, où l’on ne risque rien. Quitte à répéter les mêmes débilités et inepties, que l’agence officielle pond à un rythme effroyable. Les crâneries viennent avec le hard.
En lisant cette chronique, on comprendrait pourquoi  on a censuré les dernières parties de ce  livre autobiographique où j’évoque mon calvaire  avec les gens qui m’entourent. Mais le web est si vaste et si généreux.
Les pantouflards de la presse sont plus nombreux que les audacieux. Mais ils ne sont pas confortablement casés. On en trouve de plus incorrigibles, parmi ceux qui sont  en phase de préretraite. Deux ou trois ans avant de déguerpir. Leur inactivité porte nuisance au journal qui les emploie. L’OJD Maroc  en dévoile au quotidien les chiffres et compte les décombres. Les chutes de vente  sont dramatiques. Passer de 90000 lecteurs quotidiens à 3000, il y a de quoi s’arracher les cheveux. C’est l’Etat qui, après avoir donné le coup d’estoc fatal à ses adversaires de la presse écrite, dont certains sont considérés comme des opposants, aide ces journaux défaillants à survivre, via son œuvre de bienfaisance. Sans sa « générosité calculée », ils feraient tous Tilt, comme le Gottlieb d’antan,  que l’on connait sous le nom de  billard  électrique (flipper). On a copié ce plan de secours de l’ex-pays colonisateur : la France. Mais le copier-coller n’a rien de probant et de reluisant. Un monticule de paperasse, pour un rendement presque nul. Il y a anguille sous roche. Ce cirque  journalistique est fait pour épater le regard des touristes étrangers. En effet, quand on voit le grand étalage de titres dans les kiosques de Casablanca et des autres villes,  l’on se croirait au cœur palpitant de  l’Eden du journalisme et de la liberté d’expression. Mais les locaux connaissent parfaitement la réalité de la presse au Maroc. Ils savent pourquoi on a emprisonné tel journaliste et poussé à l’exil  tel autre. L’épée de Damoclès demeure la pub, puisque  désormais on ne peut pas compter sur le lectorat pour survivre. Cette pub  est débitée selon le degré d’obédience et de docilité  de l’organe de presse. Fermer son  robinet, c’est anticiper sa faillite.
Un  scribouillard arabophone prétend, sans rougir, être le doyen de la presse écrite. Sans doute se prend-il pour Haikal Hassanein. Si on l’a laissé travailler, c’est parce que son hebdo ne dérange pas le système, comme faisaient ’’Le Journal’’ de Boubker Jamai et ’’Demain’’ d’Ali Lemrabet. Toutes les issues sont verrouillées. Même le réseau de  distribution est hermétiquement contrôlé par des gens  du pouvoir. Liberticides, les textes de loi viennent compliquer la donne. 
Les vrais journalistes ont déguerpi, restent les journaleux. Ceux qui  ont accumulé  la poisse, durant de longues années de fainéantise font de la corruption un  gagne-pain. C’est une bouée de secours. Traitres à leur rôle, ils s’offrent aux plus offrants. Et parmi les offrants, il y a des mafieux.  Ils s’achètent à bas prix les colonnes de propagande,  pour y passer leur charabia, histoire de broder le profil avec des mots payés au centimètre dactylographié.  Il y en a même qui ont fait carrière dans ces égouts. Les rubriques sportives et cultuelles en sont contaminées. J’en ai connu des taupes au dos courbé  et que la cataracte a rendues invalides. Ils ne voient rien et on ne sait pas comment ils arrivent à faire une page avec les écrits des autres. Par complicité ou par lâcheté, les rédacteurs en chef les laissent faire, car eux aussi ne sont pas au-delà de tout soupçon. Quand le  bateau chavire et coule comme Titanic, c’est chacun pour soi et la mer pour tous. Les requins s’occupent du reste. Même le capitaine cherche à sauver sa peau avant celles des autres. C’est ce qui arrive à ces feuilles de choux, jaunies par le laisser aller et l’irresponsabilité.
Pire naïveté que de  donner aujourd’hui un livre nouvellement paru à un journaleux, pour le présenter au public. Les chargés des rubriques culturelles ne lisent pas, ou plutôt lisent les livres de ceux qui les payent. Ils ont d’autres chats à fouetter et d’autres panses à engraisser. Mais malgré la dépravation, l’on trouve l’effarante audace de réclamer au ministre de truelle l’institution d’un prix culturel. Ce sera, à coup sûr, une mascarade. C’est le rentier que l’on vise,  le culturel n’est en fait qu’une façade. Ce n’est pas le ministère qui doit le faire, mais les journaux eux-mêmes, comme ce qu’a fait France Football pour le trophée du ballon d’or. Le journal canalise les votes des autres rédacteurs sportifs.
 Les actualités livresques ne sont pas aussi fluides qu’on le croirait. Ce que l’on cache est plus important que ce que l’on  montre. Enfin, de mémoire d’un habitué (14 livres), ce sont mes communiqués que le plus souvent l’on publie. Quand le grand manitou de la rubrique culturelle veuille vouloir y faire écho, il faut souhaiter qu’on le publie sans fautes d’orthographe, de grammaire ou de style. Ceux qui de temps en temps prennent la plume pour décortiquer un roman ou un essai  ne sont pas des journalistes attitrés, mais des collaborateurs externes. Ils le font bénévolement et sans contrepartie.
A la radio  c’est la loi du tout ou rien. Si le livre parle positivement du système, on se hâte de le présenter. L’agence officielle de presse en fait tout un tapage. Et comme par providence, les interviewes se mettent à pleuvoir, comme si l’auteur était  Emile Zola  réincarné ou un tribun de high standing, comme fut Benjamin Constant, homme politique  qui ne jonglait pas avec les mots et ne craignait pas les puissants de son époque. Dans le cas contraire, si le livre comporte des analyses critiques ou des chroniques reflétant le vécu macabre, on en fait fi. L’autocensure engendre la censure.
Dire qu’il n’y a pas de discrimination  au Maroc, c’est un mensonge d’Etat. Le régionalisme n’est-il pas une discrimination ? La SNRT a un faible pour les Meknassi parce que le patron est issu de cette ville. Les autres n’ont qu’à aller boire la mer. Pour un mot on m’a censuré deux émissions  radiophoniques : dans la première interview, l’animateur m’avait demandé après une heure et quart d’enregistrement (Nagra) ce que je pensais de son émission.  Je lui avais dit la vérité. Il en fut vexé. Il s’était énervé et avait juré de ne rien diffuser de toute l’interview. Pour la seconde, on l’avait censurée pour avoir affirmé l’existence de gens qui confondent surréalisme et  « seroualisme »  (du mot seroual qui signifie pantalon).

Enfin  tout récemment, j’ai donné de main propre à la directrice de la radio-SNRT de Marrakech une copie de mon dernier livre sur le cinéma, dans l’espoir de le présenter aux auditeurs. Elle avait promis de lui consacrer  une  émission. Trois semaines se sont écoulées et mon intuition me dit d’oublier cette aventure. Les livres font peur aux petits hommes et aux  petites femmes.  Quant à la télé, c’est la censure de la radio multipliée par dix. 




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