Monday, November 09, 2020

Numérologie covidienne Par RAZAK

 

Nous vivons une ère douteuse où culminent les paradoxes et où les numéros obscurs ont donné un coup fatal à la clarté de l’alphabet. Les chiffres fous ont volé la sémantique aux phrases bien construites. La pandémie en cours de propagation a imposé sa déroutante numérologie, comme l’astrologie ésotérique hallucine interminablement dans la sienne. Le zodiac du covid (la masculinisation de l’appellation est  voulue. Le covid est plus percutant que la covid . C’est comme si on disait la spermatozoïde)  appartient à une constellation bizarroïde. D’un côté, elle semble familière dans sa sinusoïdale courbe d’évolution, de l’autre, elle sombre dans l’énigmatique étrangeté, en cultivant la diversion et le faux-fuyant. Cette inconnue-connue a égaré plus d’un épidémiologiste. Les gens assistent au corona-circus, impuissants et déprimés. Dans ce spectacle morbide,  les chiffres aventuriers se livrent à un exercice de voltigeur-trapéziste.

Le grand paradoxe dans cette affaire, c’est que, pour le moment, on  connait le nom de famille du parasite, mais pas la nature exacte de l’hybride viral qui en émane. Le problème reste entier. Tous les autoproclamés covidologues pataugent dans le vide. Les plus aguerris gardent le silence et suivent  instantanément la variabilité des mutations que le microorganisme donne à voir, via les lentilles de fort grossissement des microscopes. D’un génome à l’autre, le facétieux virus SDF joue à cache-cache. Hors des  labos, il mène la vie dure aux humains. La peur est plus féroce que les atteintes. Les  paranos que le psy-covid travaille de l’intérieur voient tout au surdimensionnement. Les pouvoirs sanitaro-sécuritaires, sur le pied de guerre, tentent l’impossible. Confinés ou dé-confinés, les gens constatent la frénésie des chiffres qui prennent la voie ascendante, malgré les mesures coercitives mises en application. Les sceptiques doutent de leur véracité. Les crédules  appliquent les directives sans  se poser trop de questions, puisque ce qui leur arrive, arrive à tout le monde. 

«Sans  les  mass-médias le covid aurait  passé pour  une simple grippe», disent  les  réfractaires.

«Attendez voir», leur rétorquent les  alarmistes. Ils pensent que ce n’est que le début et qu’il  faut  s’attendre au  pire. Ils regrettent  que  les responsables  n’aient  pas  bien réagi en amont,  pour limiter les dégâts et qu’ils aient laissé traîner les choses  en aval. Ils y ont accumulé trop de déboires et d’erreurs.

Les mathématiciens  connaissent la différence  entre l’ensemble ’’N’’ (nombres entiers naturels)  et  l’ensemble ’’D’’ (nombres décimaux), mais ils n’arrivent  pas à déchiffrer l’arithmétique  covidienne. Ses voies  semblent  impénétrables, à l’image des insaisissables fantômes qui l’ont béni. C’est un véritable casse-tête chinois  où le corona-mètre se comporte comme une horloge dont, hélas, on ignore l’horloger. Elle sonne à chaque fois qu’un chiffre record est atteint. On en déduit le coefficient de létalité et on procède à sa comparaison avec ceux d’autrui. Quand ça culmine on re-confine, quitte à appliquer la force et malmener énergiquement  les incrédules et  ceux  qui sont  contre  la doxa dominante et puis qui récusent la  transformation du  corona  en arsenal répressif, mâtant les libertés individuelles et collectives, à tel point que dans les pays des droits de l’homme l’on assiste à un effacement progressif de la démocratie.

Même les obsèques et  les rituels d’enterrement  ont  été  affectés  par  le virus. Dans les cimetières brésiliens,  on entasse les cadavres n’importe comment. Bientôt les fosses communes  remplaceront les caveaux.  En Inde les Hindous (secte majoritaire) brûlent leurs morts. On n’y verra, pendant et après la crémation,  que  la fumée, mais le corona-mètre n’arrête pas sa fatidique horlogerie.

Pour le moment, on ne connait pas le remède à cette épidémie transfrontalière et  la disponibilité du vaccin demande du temps et beaucoup de garanties sanitaires. Il s’agit de la survie des humains.

Au pays de Pasteur et  de Claude Bernard on voit flou. Un pessimisme intégral envahit les cénacles de la pensée médicale. On observe le même défaitisme dans les pays limitrophes complétant la structure hexagonale.  Les chercheurs en virologie  font profil bas. Celui ou celle qui trouvera la solution à l’énigme  empotera le trophée de la reconnaissance unanime. Le prix Nobel ne sera qu’une  récompense banale, par rapport aux acclamations populaires. La défaite face au coronavirus est avant tout une défaite de la médecine moderne. Il ne faut pas oublier le conflit d’intérêt né de l’enchevêtrement des fonctions et des prérogatives. De même, il ne faut pas compter sur les lobbys pharmaceutiques, car ce sont eux qui, alliés aux banques multinationales (par crédits  lucratifs interposés) ont mis la santé publique entre les mains  des spéculateurs capitalistes. La chasse au profit les rallie tous. L’omerta  sur le sujet est  on ne peut plus symptomatique.

« Les pauvres vont droit au mouroir »,  avions-écrit précédemment. Si une pépite médicale  est trouvée,  ces spéculateurs ne lâcheront  le morceau de citron qu’après l’avoir vidé de son suc. L’homme-loup qui fourre  son nez dans les affaires pharmaceutiques renifle la cupidité par tous les pores de son corps velu. Déjà,  certains  d’entre eux ont saisi la balle masquée en plein vol. Ils se sont  enrichis dans la vente des masques et des stérilisants. Chacun peut faire le calcul en partant de cette donnée arithmétique : Chaque individu de la planète utilise 30 cache-becs par mois voire plus, si par maladresse il lui  arrive d’abimer la muselière. Signalons que le lavage des masques les plus répandus  les rend poreux et inefficaces. De même, les tests qui en principe devrait être généralisés et gratuits coutent les yeux de la tête. Et même si par générosité ou par devoir citoyen on décide la gratuité, qui accueillera les foules de cas positifs révélés par l’examen massif et avec quel outillage médical on les prendra en charge ? Même dans les pays riches l’infrastructure sanitaire destinée au commun des mortels laisse à désirer. Une tente caïdale ne peut pas répondre aux besoins de tous  les demandeurs de lits respiratoires. En été, ce genre d’hôpitaux éphémères ne pose pas de problème, quand ils sont équipés du nécessaire. Mais en hiver, les malades qui s’y abriteront mourront plus de froid que du covid-19.

On est au premier tiers de l’automne  et comme on s’y attendait  le nombre de personnes à oxygéner grandit de jour en jour. Un re-confinement plus musclé se profile à horizon  dans  les  pays les plus touchés. Mais la remise  en cage familiale, avec les frustrations qu’elle entraine, sera-t-elle  la solution idéale ?

RAZAK    

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