Saturday, December 30, 2017
Journal L'Opinion: La chanson aigre-douce de Leïla Slimani Par RAZAK
Le
Goncourt n’est pas le Pulitzer, mais ça reste quand même une sérieuse
référence, pour la carrière de la jeune
romancière franco-marocaine, Leïla
Slimani. Cette ancienne élève du lycée Descartes de Rabat, a fait son
choix et c’est son droit le plus absolu.
Nul ne doit lui reprocher quoi que ce
soit. On n’est pas en foot où le
sélectionneur national court derrière
les binationaux, pour les intégrer à son équipe. L’écrivaine à la
chevelure Hendrix étonne, avec sa manière de faire détonner les mots. Cette
coqueluche du nouveau roman féminin a réussi,
en peu de temps, à se faire un nom au sein du microsome parisien, qui,
comme chacun sait, est devenu de plus en
plus hermétique et austère, faute de
lectorat massif. Rares sont ceux qui y percent.
Son deuxième roman « Chanson douce »
devrait être titré « Chanson aigre-douce », car il s’achève dans le sang. Déjà remarquée en 2014, avec son premier
roman « Dans le jardin de l’ogre », elle fait éclater tout son talent de
narratrice, dans le second, paru en mai 2016, chez le même éditeur (Gallimard)
et qui a été récompensé par ce prix littéraire si convoité par les
professionnels du livre, pour doper leurs ventes en Hexagone.
Ainsi, comme ceux et celles qui
réussissent, elle a fait l’objet d’attaques virulentes et gratuites. Ses idées
progressistes font peur à l’establishment
religieux. Elle a riposté avec fracas aux réfractaires, en donnant à
lire un brûlot, plus terre à terre,
puisque loin de toute fiction, il s’attaque aux
tabous sexuels, et qui à peine publié (2017), l’essai déclenche une polémique proche de la vendetta, comme
cela s’était déjà passé avec Mernissi et Noûmane-Guessous.
Tous ces cris de haine que le
chauvinisme le plus éculé envenime, relève de l’étroitesse d’esprit.
L’ésotérisme iconoclaste en amplifie et répand la terreur, dans un
conservatisme maladif et contreproductif. A chaque fois qu’un
journaliste doublé d’écrivain ose s’attaquer aux tabous séculaires, que
les traditions religieuses rendent compacts, épais et encombrants (sexe,
alcool, jeux du hasard, hégémonisme patriarcal, confréries ésotériques, mixité
et partage des biens hérités … ) on crie au scandale et au complot. Ces
conservateurs hérissés par l’élan progressiste de la jeune romancière, ne lisent pas et puis même en essayant de
lire, ils ne parviendront pas à tout saisir. Car la langue qu’elle utilise
exige un certain raffinement et un certain niveau, pour pouvoir visualiser les nuances et comprendre le sens des mots. On parle du livre primé, bien évidemment et non
pas de son dernier livre, que nous lirons à tête reposée. Pourvu qu’il
soit disponible dans les librairies marocaines.
Étant pour la liberté d’expression,
rien ne m’en offusquerait. En outre, un écrit reste un écrit. Une sorte de
parodie de la vie. Je me demande toujours pourquoi les frileux ont peur des mots ? On larmoie sur le sort de Cosette et de sa mère Fantine
que les temps durs ont larguée dans la prostitution, mais on fait le
dur-hermétique, quand il s’agit d’aveux
de femmes marocaines, relatés avec fidélité par une journaliste, à qui elles
ont fait confiance. Et puis si les femmes souillées ne comptent pas, alors que
les femmes parfaites, aux mœurs pures
veuillent vouloir nous gratifier
d’un livre de démenti, au lieu de tout ce charivari obsolète, qui n’honore pas
le pays. L’antidote d’un écrit ne peut être que de l’écriture, sachant qu’en
général, pour les écrits romanesques,
poétiques, prosodiques, monographiques et les essais, il y a une préférence pour les
lecteurs avisés que sont les critiques
littéraires. C’est leur credo et non
celui des barbus incultes et
liberticides, que l’inquisition taraude
de l’intérieur. »
Leïla
Slimani n’est pas du genre à se faire des ennemis pour rien. Si elle
s’attaque à un tabou quelconque, c’est
qu’en tant que femme, elle y ressent l’impérieuse nécessité. Elle a assez d’intelligence pour
ne pas jouer aux dupes. Est-ce un hasard si le nouveau patron de l’Elisée,
s’est vite emparé d’elle, comme une des ses proches collaboratrices. ?
Cependant l’on souhaite, que
l’exercice politique, à long terme, ne lui soit pas fatal et payant. En tant que chantre des frustrées et des
laissées pour compte, elle aurait mieux à faire, en parlant dans ses futurs
ouvrages, de ces minorités soufrant en France de marginalité et d’exclusion. Ce
serait plus impactant que de perdre son
temps dans des commissions multipartites où -municipalisme oblige- on
saute du coq à l’âne et de l’âne au robinet. L’écrivain et le politicien, font
rarement bon ménage. Ce n’est pas le
même créneau. L’un est conditionné par la conjoncture électorale, qui
dépend des particularismes du moment,
notamment quand le vote n’est pas
truqué, l’autre est interpellé
par la postérité pérenne. Par ailleurs,
tous les écrivains qui se sont essayés à la politicaillerie y ont laissé des
plumes. Tandis que ceux qui se sont
inspirés des failles des politiciens, en ont eu une glorieuse considération.
Avant de lire le roman, et vu le
tollé absurde fomenté par certaines plumes buveuses d’encre, de surcroit monolingues, je m’étais dit : « surement, il y a assez de Lolitas déshabillées et
d’orgies, pour ameuter ces vicieux qui jouent aux pudibonds ». Je n’ai trouvé
dans le récit que pudeur et chasteté. Le sexe n’est esquissé qu’en pointillé.
Même Stéphanie, la fille rebelle que Louise, l’héroïne du roman, n’arrive pas à
maitriser comme mère, est décrite avec une sobriété pudique. Une fille qui
prend des joints perd sa virginité très tôt. Ça c’est connu. Mais l’auteure a
évité de transcrire la débauche qui en découlerait. Wafa la Casablancaise est décrite, elle
aussi, avec subtilité : « Wafa fait penser à une espèce de gros félin peu
subtil mais très débrouillard. Elle n’a pas encore de papiers et ne semble pas
s’en inquiéter. Elle est arrivée en France grâce à un vieil homme à qui elle
prodiguait des massages, dans un hôtel louche de Casablanca. » (p115)
Que devrions-nous déduire de ces «
massages dans un hôtel louche » ? A part le sexe, le « louche » insinué ne
renverrait à rien. Mais l’auteure n’a
pas dit prostituée, pour donner une opportunité au doute, en laissant au
lecteur le choix de deviner ce qu’il veut. Il y assez de clignotants pour
visualiser la scène.
Leïla
Slimani a surement lu Maupassant,
puisqu’elle le cite (p 119). Et en finissant le dernier chapitre du roman où le
crime est décrit avec plus de réalisme, on pense au chef d’œuvre « Le rideau cramoisi » du grand
maître du suspense Barbey Aurevilly. Bien évidemment, la comparaison paraitrait un peu farfelue,
car le style d’écriture et l’intrigue ne sont pas les mêmes.
L’éditeur qualifie de sec, son style
d’écriture.Mais il ne s’agit pas d’une romance à l’eau de rose, mais du
pourrissement progressif du caractère d’une femme serviable à l’excès, mais qui
passe de la docilité exemplaire à l’indocilité meurtrière. Toutefois, il a raison de signaler dans le petit résumé de
la deuxième couverture: « c’est notre époque qui se révèle, avec sa conception
de l’amour et de l’éducation, des rapports de domination et d’argent, des
préjugés de classe ou de culture. »
Les affres de l’existence ne laissent à la nounou tiraillée de toutes
parts, aucune alternative. On a renvoyé sa fille du collège, les Massé, un
couple égoïste, qu’elle n’a que trop
servi ne veut plus d’elle. Alizard, le propriétaire avare et bavard lui donne
huit jours, pour libérer le studio qu’elle occupe. On sentait la pression
monter. Le drame paraissait inévitable.
Mais il n’y a pas que du noir dans ce roman, paru dans la
collection « Blanche » et qui change de texture, pour en arborer, aux derniers paragraphes, celle du thriller
policier. Slimani use d’un humour
discret : « Elle travaillait alors chez M. Frank, un peintre qui vivait avec sa
mère dans un hôtel particulier du quatorzième arrondissement. »(p108). Un peintre
au sevrage maternel tardif, ça pourrait exister dans la France cosmopolite d’aujourd’hui où tous les
énergumènes, aussi extravagants les uns que
les autres, cohabitent. Durant
les séjours parisiens, j’en ai vu de
plus de plus singuliers et de plus clownesques. Mais excepté les roublards, ils
sont inoffensifs.
La phrase la plus poétique du
roman est : « Ses mains sur lesquelles jamais le vernis ne
s’écaille. » (P105). Le descriptif documentaire s’intercale comme suit : « Les
squares, les après-midi d’hiver, sont hantés par les vagabonds, les clochards,
les chômeurs et les vieux, les malades, les errants, les précaires. Ceux qui ne
travaillent pas, ceux qui ne produisent rien. Ceux qui ne font pas d’argent. »
(p113). On ne peut pas écrire ces choses-là, si on ne les a pas vues.
De la compassion, on passe au
drame. A la page 169, on découvre
que l’affectueuse nounou Louise est
accusée d’avoir tué les deux enfants Adam et Mila, alors que le début du roman
n’en esquisse que la silhouette évasive, en pointillé sans croire que cette
femme puisse en arriver là.
Le roman s’achève avec cette phrase
mystérieuse, insidieuse et pleine de dérision : « Les enfants, venez. Vous
allez prendre un bain. » . Un refrain morbide nous y prépare dès la page 213 : « Il faut que quelqu'un meure. Il faut
que quelqu'un meure pour que nous soyons heureux. » De toutes les prémonitions étayées le long du
récit, celle du meurtre sort du domaine du prévisible, pour sombrer dans l’absolue incongruité.
Un bain de sang, cela se devine,
puisque qu’on est aux reconstituions policières qui précédent la condamnation.
Cela se déroule dans un appartement de la rue d’Hauteville, théâtre sordide de
ce double homicide, commis par une femme laborieuse, qui aime trop s’occuper de
la progéniture d’autrui, mais qui oublie de s’occuper de la sienne.
Monday, December 25, 2017
Les indéboulonnables de la culture institutionnelle par RAZAK (journal L'Opinion)
A
quoi ça sert de changer de ministre, si on ne change pas les directeurs
départementaux ? Il y en a qui ont moisi dans leur poste de directeur, en accumulant les erreurs
et les abus. Les ministres déguerpissent
eux restent. L’alternance politique, si
alternance y a, doit assurer non seulement
le renouvellement des cadres de gestion, mais aussi de l’efficacité escomptée. La
routine n’a rien de neuf. Elle donne le
désespoir à ceux qui espèrent et de la poisse
à ceux qui rêvent d’un salutaire changeant de gouvernance.
Dans
les centres cultuels et instituts européens rattachés aux ambassades
accréditées à Rabat, on constate, non
sans satisfaction, cette dynamique. Le renouvellement des directeurs est presque systématique. Ce qui permet une
diversité des approches et une fraiche
variabilité au niveau du processus managérial. Lorsqu’une
administration est figée, cela se répercute négativement sur les rouages
internes et externes.
Comme
chacun sait, le domaine culturel est en
perpétuel devenir, car les arts qui en fortifient l’ossature en en embellissant la devanture, ne tolèrent ni la stagnation, ni la vue nostalgique du rétroviseur. Le présent est plus pressant
que le futur. Mais des fois, c’est l’inverse que se produit, notamment avec cette spectaculaire révolution
cybernétique où le plus rapide parmi les rapides se croit lent et dépassé par les
événements.
N’est-il
pas temps de faire une purge en profondeur, jusqu’à la racine pourrie , comme cela a été
énoncé en haut lieu et dont les premiers débuts commencent, fort
heureusement, à apparaitre, dans le
ministère le plus difficile à gérer, celui de l’intérieur, que d’aucuns accusent, à bon
ou mauvais escient, d’immobilisme et d’autoritarisme exacerbé ? Qu’attendent les autres ministères pour faire de même ? Si on n’est pas à
la hauteur de la mission, le mieux serait de présenter sa démission, avant que l’on y soit forcé. Les
défis de l’beure imposent de tels
impératifs de redressement.
Le
nouveau ministre de la culture et de l’information a du pain sur la planche. Avec les nouvelles prorogatives,
le changement des directeurs défaillants est non seulement un vœu, mais aussi une
nécessité absolue. La gabegie et le clientélisme ne connaissent pas de répit.
La lutte contre ces fléaux dévastateurs a souffert du manque de punch et de
rigueur. Son prédécesseur a négligé de s’y impliquer avec la fermeté du
ministre qui se sait sûr de ce qu’il doit faire. Etait-ce par politicaillerie pantouflarde ou par laisser-aller proche de la
fainéantise ? On n’en sait rien. Ses proches
collaborateurs résument son action dans l’institutionnalisation des procédures d’octroi d’aide à la création,
dans diverses disciplines (arts visuels, musique, théâtre …), mais ce n’est pas une originalité. C’est du
copier-coller. Soyons clairs et francs, est-ce que l’art a besoin de charité
ou de liberté pour s’épanouir ? Voilà
un thème qui mérite un large débat plus tranchant et plus tranché.
Faisons
remarquer, non sans regret, que depuis
que ces procédures importées d’ailleurs, sont
entrées en application, la
qualité artistique et le goût raffiné ont déguerpi, pour céder la place au
dégoût et à la platitude. Le système « lajnocratique » ( du mot
’’lajna’’ signifiant comité ) est
derrière cette récession défaitiste. Les bureaucrates n’ayant pas le profil
adéquat et qui ne savent pas gérer leur institution se servent de ces
commissions-artifices, dont nous ignorons toujours les critères de sélection et
d’éligibilité, pour se disculper des erreurs commises. Le plus souvent, ils imputent les bides et flops aux membres externes qui ont statué. Comme ça, et de manière
machiavélique, on épargne les bras cassés du service interne. Beaucoup d’argent
se perd dans les futilités et ce sont ces célèbres inconnus (
fonctionnaires cherchant un complément
de salaire) qui en profitent, puisqu’ils
sont grassement payés , pour leur lourdaude présence au sein de ces
fallacieuses commissions. Quant aux artistes, ils n’en tirent que du brouillard.
Pire, ils servent d’alibi à cette horde de profiteurs. Dans les listes mises
’’online’’ par le ministère, à la
rubrique ’’arts visuels’’ on trouve deux
imprimeurs-éditeurs et qui ont tellement de ressources pour demander de
l’aide à l’Etat , s’accaparent la part du lion du budget alloué. L’un de ces deux
bénéficiaires privilégiés imprime en deux langues , un magazine cloné sur la
célèbre Historia, sans en avoir l’érudition. Ce qui suppose la possibilité de
bénéficier de deux fonds d’aide : celui réservé à la presse et celui des arts visuels via les
monographies. Il y a surement quelque chose qui cloche. La commission qui en a
décidé, est-elle myope ou soudoyée ?
Pourquoi
préfère-t-on les bureaucrates aux journalistes intègres, notamment ceux qui
ont passé plus de trente années dans la rubrique culturelle ? Ils connaissent tous les
noms d’artistes et d’autres choses que ces administratifs, régis par un statut
liberticide et antiartistique ne peuvent pas connaitre. La réponse est
simple : on ne veut pas que les secrets du « tagine » interne soient
divulgués. La presse fait peur. D’où le recours aux enseignants, aux intrus et aux gens qui savent conjuguer les deux verbes :
manger et se taire.
Enfin,
quel a été le meilleur ministre de culture que la Maroc a connu depuis
indépendance ? La France, par exemple, pourrait se vanter d’avoir un ministre de la
culture de la carrure de Malraux. Un talentueux
écrivain et un gestionnaire habile, qui était admiré même par ses adversaires
politiques. Les sexagénaires pourraient dire : Mohamed Fassi , d’autres moins
âgés , préféreraient Allal Sinacer ,
malgré la courte durée qu’il a passée
au ministère. Cultivé et modeste, on lui doit un brillant colloque
international de philosophie où Jacques
Berque fut gratifié de tous les
hommages. D’autres, notamment les
Nordiques, diraient Benaissa. C’est ce dernier
qui a créé l’ISADAC, en partant
de presque rien et en choisissant l’homme qu’il faut pour le diriger. Il s’agit
d’Ahmed Badri. Tout récemment, des ex-étudiants de cette institution ont rendu
hommage à leur ex-directeur, mais on s’est trompé de personne. Ce sont
Bebaissa et Badri qui en sont
prioritaires, car ils sont de véritables baliseurs du désert. Les pionniers
valent mieux que les continuateurs.
On a
pris l’habitude de dire des vérités qui fâchent. Celle-là s’ajoute aux plus
anciennes. Ainsi, pour prouver qu’on n’est pas de ceux qui jonglent avec les
louanges, au profit de quelqu’un ou quelqu’une, de quelque rang qu’il (ou elle ) soit , on la complète avec cet
aveu pour en avoir le cœur net : Benaissa n’est pas mon ministre de la culture préféré, je n’ai jamais été invité à son controversé festival et durant
son mandat , mes billets critiques lui désagrégeaient l’humeur. Mais sur ce
point, uniquement ce point-là, il mériterait qu’on lui rende justice. Ahmed
Badri a, lui aussi, fait un travail
remarquable. La critique intègre est ainsi faite. Pas de quartier pour les
médiocres et que le plus talentueux gagne. C’est notre devise.
Est-ce
par hasard si, partant de rien et sans l’aide matérielle de qui que ce soit, le
prix transculturel que nous supervisons depuis 2005, dans l’oubli de soi et la
clarté a atteint sa douzième édition ? Bientôt le lauréat 2017 ( après Plantu, Ennio Morricone et Peter Brook
) sera révélé à la multitude. C’est grâce à ces nobles principes et à cette
précieuse devise que le cortège bouzghibien
(de Bouzghiba–Awards ) traverse les ans
dans la probité, et l’honneur , sans
céder à la tentation mercantiliste, qui a frelaté pas mal de cénacles et
souillé ce qui est beau en l’être humain : l’art de partager les émotions
et les idées lumineuses.
Cinecittà entre le péplum et l’enclume Par RAZAK (journal L'Opinion)
Qu’est-elle devenue Cinecittà, la fameuse
cité italienne de tournage cinématographique où furent tournés ''Ben Hur'',
‘’Quo Vadis’’ et ’’La Guerre de Troie’’ ?
Incendiée en 2009, on l’a réhabilitée pour
sauver les apparences, car l’essentiel de sa courte vie est derrière elle. La
Cinecittà reliftée diffère de celle qu'une fuite électrique ou une main
criminelle aurait calcinée. Avant le
sinistre, et avant même d’intégrer l’Espace Schengen, elle avait commencé à donner des signes
d’agonie. Elle n'avait pas pu résister à l’inflation. Le déficit était énorme. Cette inflation n'avait pas été provoquée par la chute brutale de la
lire italienne, mais par le déclin cinéphilique sans précédent que connut cette
péninsule où les arts du spectacle avaient connu à une certaine époque un essor remarquable, qui fit des envieux et
des émules dans toute l’Europe. Quand on parlait de l’opéra, on pensait à
Pavarotti et quand on causait du cinéma européen, le nom de Fellini revenait
sans cesse dans ces discussions cinéphiliques. Aujourd’hui, l’engouement pour l’art de la scène semble céder la place
aux nécessités du végétatif. Il y a
encore quelques survivances éparses et
disparates, mais ce n’est pas comme jadis.
Pourquoi faire des films, s'il n'y a personne
dans les salles pour les regarder ? Cette logique a gelé le sang dans les veines de Cinecittà. Quand
elle a rouvert à nouveau ses portes en 2011, la nostalgie s'est emparée des
rêveurs parmi les rares ciné-investisseurs qui sont restés accrochés aux
lumières du passé. Mais ces professionnels du cinoche ne savent pas ou feignent
d’ignorer, que la donne a complètement et radicalement changé. Les péplums qui
avaient fait sa gloire, c'est désormais, de
l'histoire ancienne. Par ailleurs, avant l’incendie, on en était à la saturation. Les ''Cléopâtre'', ''Hercule'' et ''Ulysse'' avaient été
copieusement cinématographiés à l’overdose. Il n'y a plus d'autres Odyssées et
l'Iliade a été mille fois feuilletées par les adaptateurs du plus
routinier au plus ambitieux.
A moins de jouer aux amnésiques pour
reprendre tous les remakes, mais dans ce
cas, on risque de tomber dans la répétition et la redondance, choses qui ont
été derrière la débâcle que connait le cinéma mondial d’aujourd’hui. Comme par
malédiction, l’originalité a cédé la place à la
falsification.
Quand les péplums ont expiré, le western
italien, ( genre ’’Trinita’’ ou ’’Django ’’ ) voulait prendre la relève, mais
il n’ y parvenait que partiellement et sporadiquement, parce que fantaisiste et d’un intrigue
superficielle, il ne plaisait pas aux Américains, qui disposaient des plus
grands distributeurs de la planète. Même chez eux, le western est tombé en
désuétude, par rapport aux années 50 où il fut apprécié par la multitude. Le
dernier western crépusculaire remonte à plus de trois décennies. Par ailleurs,
les gros producteurs américains qui
veulent investir dans le genre préfèrent , pour le tournage de leurs films, le
''Canyon Walley'' et le Mexique, pays voisin dont l'histoire et la géographie
sont proches de ce qui est décrit dans les scripts. Le Rio Grande ( prononcer grande en espagnol ) ,
fleuve-frontière, est évoqué dans une
multitude de films westerns. Alors pourquoi aller plus loin quand les parages du Colorado et du
Mississipi offrent des opportunités insoupçonnées et présentent des atouts
considérables ? Le cinéaste prolixe John
Ford a fait du ''Canyon Walley'' un studio plein-air pour ses films de cow-boys
et de cavaleries Yankee.
Actuellement, Cinecittà est devenue l’ombre
d’elle même. Elle ne fait que vivoter. Le loisir remplace la fluidité des tournages.
Une manière de se recueillir sur un cinéma décédé avant le temps. Le tragique
avait été imprimé dans ses gènes dès le
premier vagissement. Elle avait une naissance perturbée. Créée par Mussolini en
1936, pour concurrencer Hollywood, les intellectuels antifascistes de
l’après-guerre ne voulaient pas d'un héritage embarrassant, légué par un
farouche allié d'Hitler. Vaincue dans ce
challenge, la pauvre Cinecittà n'avait eu comme alternative que de livrer son
sort à la magnanimité des amateurs de
cinéma, restés fidèles au grand écran et
à la générosité de quelques producteurs de films se souciant peu de la
rentabilité de leur mise. Cela ne pouvait pas durer longtemps, d'où
l'inévitable débandade. Cinecittà a été condamnée à l'oubli. De nombreux travailleurs de cette usine de fabrication des
images ont été jetés au chômage forcé . Le personnel qui y travaille
actuellement ne représente qu’une infime fraction de ce qu’il était autrefois.
Ce complexe de tournage a eu a eu une vie en
dents de scie, avec des hauts exaltants et des bas inquiétants. Ainsi, comme par malédiction, un grand dépôt de
ferrailles occupe actuellement son voisinage immédiat. Cette fourrière de la
casse où les sons d’enclume étouffent les sons épiques des
péplums commence à nuire au peu qui reste de sa vocation primordiale. On
raconte même qu'on a failli en faire un complexe hôtelier, pour fermer à jamais
son journal de tournage. Cette mutation contre nature aurait été une honteuse
incongruité pour un pays qui a enfanté des génies de cinéma tels Fellini,
Vittorio De Sica , Visconti , Pasolini et Sergio Leone.
C’est en fait un des premiers désagréments que la capitale italienne a
réservés à mon furtif passage, du mois de janvier 2016. Je voulais assister à
d'éventuels tournages, je trouvais un
sarcophage, enjolivé par les apparats de circonstance. Certes, les hectares
fonciers ont été épargnés, et les pavillons remis au goût du jour, avec plus ou
moins de sobriété, mais ce qui ont disparu ce sont le cœur et l’âme du cinéma,
c'est-à-dire l'art de faire les grandes fresques
cinématographiques comme jadis, avec le concours des bons metteurs en scène et
des meilleurs décorateurs-accessoiristes. Hormis quelques sériés télévisées où
le simulacre historique prend le dessus
sur les faits réels, les locataires ne
se bousculent pas devant le portail. Le cinéma de masse qu’elle alimentait avec
de nets bénéfices, a été jeté aux
calendes grecques. Certes, elle refait
surface, mais il lui est difficile de
surmonter la pente, notamment à une
époque conquise totalement par le digital et où le numérique dans tous ses
états s'est accaparé tous les substrats imagés, urbains et ruraux. La
cinéphilie de salle subit toujours la même érosion dévastatrice. Comme
alternative salutaire, il ne lui reste que la voie muséale où les visiteurs se
laisseraient émouvoir nonchalamment par
sa courte histoire. Ainsi, comme le Colosseo, elle raviverait la mémoire
collective.
Qui s’assemble se ressemble, Cinecittà et le Colisée ont toujours fait bon voisinage, malgré leur
relatif éloignement sur la carte de la ville dont la légende dit qu’elle est éternelle. L’une est parodie de
l’autre. En effet, comme vestige d’une
époque avide de conquêtes et de sang, l’ex-arène de gladiateurs bâtie par
Vespasien et achevée par son fils Titus avec le butin des conquêtes, a été
plusieurs fois ressuscitée par Cinecittà. Les bobines archivées dans les cinémathèques en témoignent. Son histoire se
confond avec les drames humains qu’elle abritait. C’était un véritable mouroir.
Son sol s’est longtemps imbibé du sang des duellistes. On s’y entretuait devant
les regards amusés des anciens Romains,
avec à leur tête l’insolent empereur Jules César et son entourage immédiat qui
cachait à peine son tempérament sadique. On se délectait de la mort d’autrui.
Ce torero à la romaine faisait jouir ,
outre mesure, les sujets de l’ex-empire.
Seuls, les plus forts ayant l’agilité surhumaine et la chance d’échapper aux
griffes d’un lion féroce ou au trident pointu d’un adversaire en furie en
sortaient indemnes, affranchis de l’esclavage et éventuellement couverts de lauriers
du vainqueur.
Cinecittà va inéluctablement dans le sillage
archéologique du Colisée, avec la primauté du touristique sur le
cinématographique. Peut-être, le futur « Musée Cinecittà » trouverait dans
sa nouvelle orientation une autre raison d’être.
Tandems de cinéma Par RAZAK (journal L'Opinion)
Tandems de cinéma
Par RAZAK
Un
tandem est un attelage à deux. Les tandems qui roulent bien nécessitent
une mécanique bien huilée et une efficacité dans le choix des
itinéraires à emprunter. Ceux qui ont fait carrière dans le cinéma ont
eu des fortunes diverses. On doit leur longévité, plus à l’entente
cordiale, qu’aux calculs pernicieux. Certains n’ont pu être séparés que
par la mort. D’autres ont vu leur destin prendre des directions
opposées, à cause d’un petit malentendu, qu’un peu de sagesse aurait pu
éviter. Ainsi, le premier tandem à citer dans cette étude, est un tandem
familial: les frères Lumières: Louis Lumière et Jean Lumière.
Ces deux inventeurs français créèrent la première usine française pour
la fabrication du matériel photographique et organisèrent l’une des
toutes premières projections publiques et payantes du cinématographe.
Outre-Atlantique, leur émule Edison, qui ne cessait de revendiquer la
paternité du système, avait acquis, à son tour, le brevet d’un
projecteur pour les films du kinétoscope et lance le vitascope. Il
avait, lui aussi, fait tandem avec un autre inventeur moins connu que
lui: Thomas Arma.
Les
Lumières étaient pour le septième art ce qu’étaient Pierre et Marie
Curie pour la chimie et les Grimm pour la littérature enfantine. Un
autre tandem d’origine européenne a fait parler de lui de manière
élogieuse, il s’agit de Sergio Leone et Ennio Morricone. Ces deux
diables d’hommes ont marqué le cinéma universel, avec un genre de
western spectaculaire, baigné dans une musique sibylline. Les deux
hommes se complétaient, parce qu’ils avaient beaucoup d’affinités en
commun. Ennio Morricone étudia l'harmonie et la trompette dans un conservatoire de musique. C'est
son ami d'enfance Sergio Leone qui lui donna l'occasion, en 1964, de se
faire un nom parmi les compositeurs de musiques de film les plus
réputés de la planète. Ainsi les films " Il était une fois dans l’Ouest ", "Le Bon, la Brute le Truand" , "Et pour quelques dollars de plus", sont devenus des classiques. Ils sont le fruit de cette collaboration fructueuse.
Après l’hommage que nous lui avions consacré à Rabat en 1994, et cela avant que les pourvoyeurs des Oscars américains n’y pensassent, nous l’avons auréolé en 2015 du 12e
Prix International de l’Humour ( prix transculturel connu sous le nom de
’’Bouzghiba-Awards’’ ). Pour remettre le Tableau-Trophée au lauréat, on
était allé jusqu’à Rome, fief d’ex-gladiateurs et de légionnaires.
Comme le grand maestro était en tournée européenne, l’Académie Nationale Sainte- Cecilia,
(l’ex-conservatoire) où il avait étudié la musique, a eu la
bienveillance de se charger de le lui remettre, une fois retourné à
Rome. Nous la remercions pour cette affabilité. Nous avions adjoint au
trophée deux exemplaires des tomes 1 et 2 de la monographie dédiée aux
B-Awards. Le premier tome a été édité au Maroc, le second en France. Ce
dernier est déposé à la BNF, au même titre que les trois autres
créations littéraires : ’’Mère Gé face aux tribulations de Père Dé’’,
’’Zona’’ et ’’ Navarenne ’’.
Laurel
(Stan) et Hardy (Olivier), le duo comique du cinéma américain, qui
avait ému des millions de cinéphiles et de téléspectateurs, connut une
fin de carrière tragique. Le premier acteur de taille fine passait pour
l'incorrigible maladroit du cinéma, le second, obèse payait les œufs
cassés. Le tandem était bien lubrifié et marchait comme sur des
roulettes. Et pour ne pas le laisser se briser, les deux partenaires
avaient choisi de ne pas se fréquenter en dehors des plateaux.
Apparemment, il n’y avait jamais eu de discorde entre eux, même si, à
l’écran ils jouaient aux frères ennemis.
Malheureusement,
Hollywood leur a joué un vilain tour. Les clauses du contrat initial
n’ont pas été renouvelées pour rehausser leur salaire. En 1957, Hardy
décède dans la misère. Quant à Laurel, il fut récompensé par un "Oscar
spécial" , avant de rejoindre son compagnon de route, dans l’au-delà.
Les jeunes générations qui n’ont pas encore vu les films de ce duo
humoristique, auront grâce au zapping, l’occasion d’apprécier leur
talent, soit en analogique ou numérique. Pourvu que l’on se fixe, via le
décodeur, sur la longueur d’onde appropriée. Au lieu de ces sitcoms
débiles, (sitcoms de mangeaille, aimerions-nous dire), qu’à
l’accoutumée, les chaînes arabophones présentent au mois de Ramadan, une
rétrospective de ces célèbres comiques (Laurel et Hardy, Charlie
Chaplin, Mark Sennett …) intercalée des meilleurs sketchs locaux aurait
fait l’affaire. Cela permettrait de mesurer le talent des uns et des
autres et de faire de la télévision un outil de progrès, non pas une
drogue abêtissante. Youtube reste un support de culturation massive. Il a
des atouts indéniables. The best of Laurel and Hardy, restent : "Au Far
West", "Livreurs, sachez livrer!", "Les Compagnons de la nouba", "Têtes
de pioche", "Les Conscrits" et "Drôles de locataires" .
Revenons
en Hexagone, l’allusion en vaut le rappel. Les deux acteurs connus sous
le nom de Jean Paul Belmondo et Alain Delon ont failli réussir leur
tandem, à l’époque où le cinéma français était apprécié par de nombreux
cinéphiles maghrébins. Mais le destin en a décidé autrement. Le succès
de "Borsalino" augurait d’une belle relance. Mais ce n’était qu’un
mirage. Faisons remarquer que les acteurs chevronnés tels : Lino
Ventura, Jean Gabin, Gérard Philipe, Louis Jouvet, Raimu, Michel
Constantin et Jean-Louis Trintignant pouvaient facilement faire tandem
entre eux, mais les scénaristes et les réalisateurs les préféraient
évoluer plus en solo qu’en duo, dans des fictions de moins en moins
attrayantes.
Roger Moore et
Tony Curtis ont essayé de faire tandem dans une série qui passait très
bien: "Amicalement votre", mais leur itinéraire bifurqua aussitôt le
tournage terminé. L’un sera sollicité pour endosser le costume de James
Bond (’’Vivre et laisser mourir’’, ’’L’Homme au pistolet d’or’’ …)
l’autre se contentera d’apparitions occasionnelles.
En
1969, Robert Baker réfléchissait à un télé-feuilleton où il mettrait en
opposition deux personnages fondamentalement différents, mais unis par
une solide connivence. Ce fut "Amicalement votre". Acculés à jouer aux
détectives malgré eux, les deux personnages sont décrits comme une
complémentarité dans l’adversité caractérielle. Laissons le juge Fulton,
qui est aussi un des personnages-clefs de cette série, décrire ce
tandem en ces termes: « Le premier est un sang-bleu issu d’une grande
famille, Lord Brett Sinclair …l’autre est plutôt différent, un
arriviste, Danny Wilde ...L’un sans l’autre, ils n’ont aucun intérêt
pour moi. Ils ont tous les deux une certaine valeur, mais additionnés,
comme en chimie…Prenez deux produits relativement peu dangereux, disons
du nitrate et de la glycérine. Mêlez ces deux produits et vous allez
obtenir une combinaison explosive ! » . Le scénario, rappelons-le, est
de la plume de Brian Clemens.
Vers la fin des années vingt du siècle dernier, Salvador Dali, le peintre surréaliste
né en catalogne, a fait tandem avec Luis Buñuel et le résultat fut un
des plus ahurissants. Le duo a donné à voir deux films d’une écriture
cinématographique inédite: "Un chien andalou"
et "L'Age d'or". Mais le succès a transformé les deux partenaires en
coriaces adversaires. Chacun minimisant l’apport de l’autre. C’était du
cinéma surréaliste avec des images syncopées, violentes et des allusions
iconographiques d’un autre monde. Sur la pellicule de cellophane, comme
sur ses toiles, Dali a su imprimer sa griffe. La réalité est
transcendée, pour devenir un succédané de clichés oniriques où le
cauchemar pouvait s’immiscer sans demander l’autorisation. Les acolytes y
trouvaient matière de jouissance intellectuelle et libidinale.
Les
deux courts-métrages font sensation. Mais le tandem se brise, car le
deuxième film sortira sans le nom du peintre au générique. Dommage, pour
le cinéma d’auteur. La cause est si futile que les cinéphiles devraient
les plaindre. Dans la brochure de présentation du film, Salvador Dalí
écrivait:
«
Mon idée générale en écrivant avec Buñuel le scénario de L’Âge d’or a
été de présenter la ligne droite et pure de "conduite" d’un être qui
poursuit l’amour à travers les ignobles idéaux humanitaires,
patriotiques et autres misérables mécanismes de la réalité ».
Mais
Buñuel fut vexé. Il dut rompre avec l’un des amis les plus créatifs.
« À ce moment-là, Dalí et moi avons mis un terme à notre amitié. Cela
s’est passé précisément trois jours après le début de notre
collaboration », confiera-il.
Côté thriller, l’australien Mel Gibson et l’américain Danny Glover ont
eux aussi fait tandem dans "L’arme fatale". Vu le succès commercial
remporté par le premier film, on récidive avec plusieurs autres
productions portant le même titre. La réalisation est signée Richard
Donner. Les deux coéquipiers ( Black and White ) ont dû beaucoup
souffrir dans le film, car leur mission n’était pas de tout repos. Rien à
voir avec les flics bon chic bon genre de Miami, qui circulent en short et sur des bicyclettes.
Le
cinéma indien a , lui aussi, ses tandems. Amitabh Bachchan et Shah Rukh
Khan en est un des plus populaires du sous-continent asiatique. Les
deux méga-stars indoues ont partagé l’affiche dans plusieurs films dont
"Mohabbatein","Veer Zaara" et "Kabhi Khushi Kabhie Gham".
Que
peut-on conclure de cette étude, que nous aurions aimé présenter sous
forme de film documentaire, si les moyens de production étaient
disponibles ?
Primo: la catégorisation fonctionnelle qui facilite outre mesure la
classification est fondamentale pour l’approche. Ainsi, poussée à
l’extrême, l’analyse nous permet d’identifier deux catégories
distinctes: des tandems d’initiation et de conception (comme les frères
Lumière, Leone-Morricone …) et puis des tandems d’exécution (on y
retrouve tous les acteurs et comédiens précités) , ainsi que deux
colorations caractérielles sous-jacentes: des attelages consensuels et
oppositionnels. Laurel et Hardy est un tandem oppositionnel d’exécution
tandis que Dali et Buñuel formaient un tandem consensuel d’initiation
avant de s’écarteler.
Secundo:
L’absence quasi symptomatique de tandems de cinéma exclusivement
féminins. Certes, on a vu Uma Thurman faire tandem avec Meryl Streep,
mais c’était fugace. Peut-être que dans les années à venir, on pourrait
en voir de plus pétillants et plus solides. Tandis que les tandems
"homme/femme" sont innombrables. L’attirance sentimentale en est le
ciment. Mais la plupart d’entre eux est de type exécutionnel. Songez à
tous les couples célèbres qui ont partagé de manière répétitive,
l’affiche dans des chefs-d’œuvre cinématographiques.
Tercio:
La présente étude peut être étendue à tous les autres arts sans
exception. En musique et poésie par exemple, nous aurons une panoplie
d’attelages réussis tels que Joan Baez-Bob Dylan, Simon et Grinfuncul,
Oum Kalthoum-Ahmed Rami (le poète écrira à la diva égyptienne plus de
100 Kassida), Fouad Najm-Cheikh Imam, Fairouz-Rahbani, Marcel
Khalifa-Mahmoud Darwish, Léo ferré-Aragon. Côté terroir populaire, les
duos Karziz et Mahrach, Kachbal et Zeroual sont des tandems d’un genre
spécial. Ils mettent des gags dans de la musique folklorique.
Le
ballet a aussi ses tandems qui font vibrer la foule , comme le russe
Rudolf Noureïev qui fut souvent associé à Margot Fonteyn, la danseuse
étoile britannique, qui reçut en 1979 le titre de "Prima Ballerina
Assoluta" (Première Ballerine Absolue). La littérature regorge de
personnages fonctionnant en tandems, avec les connotations
sus-indiquées: Don Juan et Sganarelle, Don quichotte et Sancho Pansa, Jean Valjean
et Javer… Côté auteurs, le duo Sartre et Simone de Beauvoir fut un des
plus influents du siècle dernier. Le théâtre universel en offre une
multitude. Dans "En attendant Godot" les deux protagonistes Pozzo et
Lucky forment un tandem fantastique dans l’adversité intellectuelle la
plus absurde.
Bziz
et Baz, l’un des plus célèbres tandems marocains de l’humour caustique,
a passé lui aussi du tandem consensuel à l’oppositionnel, avant de se
disloquer. L’un n’a pas de problème avec les médias audiovisuels
officiels, l’autre est proscrit depuis de nombreuses années, pour des
raisons inexplicables et absurdes.
Quand
un tandem fonctionne à merveille, le répertoire s’enrichit et les
belles choses passent directement en postérité. Mais quand sa mécanique
tombe en panne, c’est le "sauve-qui-peut" qui prédomine. Dans ce cas,
l’histoire de l’art n’en retient que les débris de casse et les dégâts
difformes. Elle s’appauvrit ou plutôt elle s’enrichit de banalités,
vides de sens.
Avez-vous
pensé aux belles œuvres qui pourraient être cosignées par Dali et
Buñuel, Fouad Najm et Cheikh Imam, si l’adversité ne les avait pas
séparés à jamais, et puis au fou rire que Bziz et Baz provoqueraient à
la télé ou dans les salles de spectacles si, à nouveau, ils refaisaient
tandem ?
*Note
de l’auteur: Pour ceux qui apprécient ce que nous écrivons sur le
cinéma, on signalerait que le deuxième tome du livre « A Voix nue,
chroniques cinématographiques » sera publié prochainement. Dans l’année
2018, qui vient à pas pressés, il y aura une autre surprise.
Friday, December 15, 2017
كيف الحب في زمن داعشه سوء الحض ؟http://www.ritajepress.com/?p=63482
http://www.ritajepress.com/?p=63482
شعركيف الحب في زمن داعشه سوء الحض ؟كل التعابير المرحةانمحت من الأفقامتزج الدمع بزبد البحرهمت من حيث لا أدريباحثا عن قوس قزح المفقودرحل من التل المعهودفاكتشفت أنه سكن في دواخلي خفيةكمالك لعقار قوامه لحم وعظمضياءه أشعل النار في الأمعاء والعروقلا تسألوا البحرعن صوته المبحوحرجل قاوم الزمنبشتى العزائمشرب موجه المحموممن ألفه إلى يائهحتى الثمالةكسكير يريد أن ينتحر بالملحعند القيءامتلأ الشاطئبحلزون البحرمشقوق الظهروالطحالب المتسخةوآسنان القرش المهزومالخارج من ساحة الوغىمطأطأ الرأس ومكسور الفمفي البارحةكنت أحلمبصباح أزرقوبقمر بنفسجي المظهروبأناس أنيقة المحيى والملمحلا تضر ولا ُتضَرْحلم بديع كحلم الصغررحلت بعيدا بعد النظرممتطيا جوادا عابرا للسماواتصنعته بالكلمات المتلألئةعلى شكل طائر الفينيقحلقت في السماوات السبعوبعد التسع يوجد سر الكون المستتربحثا عن الحقيقة وعن الحبلم أجد إلا الضباب والسرابووجوه الخوف والرعبزمن رديء داعشه سوء الحضحتى صار القتل المتعمد كألعاب طفلأي إله هذا يسمح بهذا العبث البشع ؟الجهاد في المعرفة و العلملا في إزهاق الأرواح تسيبا وبلا إذناتسخ الدين بأيادي الجهلةوالجهل فينا استأسد وتوغلالبراميل الفارغة تطنو العقول النيرة تئنالأنذال والحثالة استعمروا الأماكنفي الغش يحلو لهم العيشوفي النوازل تصغر العقولبتشرذم النفوس و الهممكلاب المجازر تطاردني كالأشباح المرعبةأينما رحلت وحيثما حللتأجدهم أمامي مكشرين الأنيابكالذئاب الجائعة أمام الحملويل تم الويل لمن رماه زمان الغدربين داعشية عمياءتقتص من كل شيءومخزن غاشيتحاور بالشتم واللكمما الفرق بين داعشي وحشيوبلطجي يتبول على مبادئ حقوق الإنسان ؟يهين من هم أشرف منهويرضى بنمط عيش ذبابة في ذيل كلبرزاق عبدالرزاق
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