FAHRENHEIT 9/11
Le dernier opus de Michael Moore ’’Fahrenheit 9/11’’ réussira-il à
changer la donne lors des prochaines élections US? Il est difficile de spéculer
sur quelque chose d’aléatoire. L’Amérique des Bush n’est pas l’Espagne de
Fedricio Garcia Lorca.Le lobbying est très actif dans ce fabuleux pays, qui est
un des plus complexes de la planète. Si par miracle l’alternance a lieu, la
ligne tracée par les ’’faucons’’ restera inchangée.
Autre question plus actuelle, qui concerne
les Arabes de plus près: le retour des Démocrates au pouvoir peut-il aider
l’Irak et la Palestine à retrouver leur indépendance? Rien n’est sûr, car les
déclarations du challenger laissent penser à une continuité dans la rupture.
C’est-à-dire que la problématique moyen-orientale restera entière.Donc le
pessimisme reste de rigueur, même si le monde veut un changement urgent qui
apaise et non un transfert de pouvoir aliénant et lénifiant.
Alors quelle est la marge de manœuvre de
Micheal Moore, quelle incidence ’’Fahrenheit
9/11’’ peut-il avoir sur le cours des choses? La tactique a pour but
d’empêcher le ré-intronisation de Bush. Le titre du film est une métaphore où
les fameux numéros 9 et 11 renvoient plus au 11 septembre qu’aux valeurs
thermiques. Rappelons que le degré Fahrenheit est une unité de mesure des
températures, utilisée par les Anglo-Saxons et que 32 Fahrenheit correspondent
au zéro Celsius. 9 et 11 Fahrenheit sont dans la zone froide.Or le réalisateur s’affiche
comme un incendiaire, c’est-à-dire que pour que cette alternance se produise,
il s’investit dans l’opposition en mettant le feu à la poudrière et ce à
quelques mois du scrutin présidentiel. Ce fighting peut élever la température
de la compétition et de l’adversité à des degrés extrêmes, mais pas au point de
griller le thermomètre et exploser le mercure.
Moore a pu exprimer son raslebol en lançant
une bombe ’’électoralogène’’. Il ne le fait pas en sympathisant pro-démocrate,
mais en observateur désabusé par ce qui se passe devant ses yeux. Il a réussi à
faire d’un documentaire une œuvre qui ne passe pas inaperçue (Palme d’Or au
festival de Cannes-2004, bon score au box-office…).
Le brûlot est un réquisitoire contre la
politique de Georges Bush, notamment au Moyen-Orient. Mais ceux qui connaissent
le pays de l’Oncle Sam savent qu’il ya autant de variables que de constantes,
que l’on soit en présence de Républicains ou de Démocrates.Les Palestiniens le
savent très bien, mais comptetenu de la vie dramatique qu’ils mènent, ils n’ont
rien à perdre. Rappelez-vous que même au temps où les Démocrates dirigeaient le
pays, les Palestiniens avaient toujours souffert du veto américain.
Le mur de la honte vient d’être gratifié par
un énième veto républicain, approuvant son érection, alors que la communauté
internationale s’indigne. Certes, le film peut contraindre les idéologues de la
’’White House’’ de prendre conscience des conséquences de leur politique, mais
espérer un changement radical, par les temps revanchards qui courent, cela
paraîtrait improbable, même avec des pacifistes convaincus au sommet de l’Etat.
Michael Moore utilise, comme à l’accoutumée,
la dérision, comme arme de persuasion. Il ya quelque chose de messianique dans
cette attitude combative. L’ardeur du propos cinégraphique dépasse la limite du
fair-play narratif.
Tout commence fin 2000 avec les élections
présidentielles aux Etats Unis. Georges W. Bush gagne en Floride après le vote
de la Cour Suprême alors qu’Algore comptabilisait plus de voix. On ne sut
toujours pas par quel coup de dé, la balance à basculé du côté républicain.
Faisons remarquer d’emblée, que les adjectifs qualificatifs ’’républicain’’ et
’’démocrate’’ sont galvaudés à outrance dans le contexte que nous analysons,
car les spécificités relatives à chacun des deux clans, sont idéologiquement
similaires. Ce n’est pas comme en Espagne où
Sénior Zapatero va dans la direction opposée de son prédécesseur, parce
que le peuple espagnol l’a voulu.
Bref, la présence américaine en Irak aurait
toujours des motifs avoués ou non avoués, pour son indispensabilité.Le joug
risque de perdurer à l’infini. L’histoire du film commence par ce vote
controversé. Moore a concocté un mélange détonnant fait d’images d’archives,
intercalées de témoignages saisissants et anecdotiques. Tout est mis en branle,
pour montrer le côté contestable de la politique de Georges W. Bush.
Du point de vue cinéphilique, le film a créé
un précédant à Cannes.En effet, jamais cette ville n’a offert, via son
prestigieux festival, sa plus haute distinction à un film documentaire. Les
«fictionnistes» crient au scandale, tandis que leurs émules saluent le courage
de ce cinéaste et font de lui un porte-étendard. N’oublions pas qu’en Amérique
de ’’l’après-11-septembre’’, des lois liberticides ont été votées, pour
contraindre l’opinion publique au silence forcé.Le film est sorti à une époque
d’interrogations. Ces débats effrénés ont contribué au succès du film.Plus on
en parle, même mauvaisement, plus on donne l’envie au public d’aller voir le
film. Paradoxal !
La fièvre "docu-Moore" embrase
l’Europe.Le film a rapporté à son réalisateur des sommes conséquentes que ce
soit en Angleterre, en France ou au Benelux.Aux Etats Unis, le film a rapporté
plus de 80,1 m en 17 jours d’exploitation et ce malgré les restrictions
imposées par les grands distributeurs notamment la filiale Miramax.Bientôt, il
dépassera la barre des 100 millions de dollars. Le film embrase la toile. Les
downloads (téléchargements) sont, tenez-vous bien, autorisés par l’auteur. Le
film est diffusé sur Internet via moult interfaces d’accès, mais Michel Moore
s’en réjouit au lieu de crier au vol. Il a donné à lire dans le SundyHerard des
choses étonnantes: "Je ne suis pas
d’accord avec les lois sur les droits d’auteur" déclare-t-il "et cela ne me gène pas que des personnes
téléchargent mon film" et d’ajouter
"Plus il y a de personnes qui voient le film mieux c’est, et c'est
pourquoi je suis content que cela se produise ".
Moore est un des rares cinéastes à se
déclarer publiquement, pour cette forme de diffusion freeware. Il paraît qu'il
ne cherche pas à faire du fric, mais passer un message à qui de droit.Mais le
bon samaritain pourrait-il rester aussi magnanime, quand un producteur argenté,
ne jurant que par sa sainteté le dollar, lui confierait une fiction
hollywoodienne? Qui vivra verra.
Quoiqu'on
dise ou
médise ’’Fahrenheit 9/11’’reste un
documentaire osé. En pamphlétaire impertinent, Michel Moore a déclaré "J’ai fait ce film parce que je veux
que le monde change ". Sa médisance est née de la comptabilité des
actes manqués de l’administration Bush et le tic fabulateur des ’’faucons’’ mis
à son service.Résumons: Si après l’occupation de l’Irak, on a trouvé des
preuves tangibles au mensonge d’Etat relatif aux armes de destruction massive,
le pamphlet de Moore aurait été un travail de sape et de dénigrement.Ses
bobines n’auraient aucun intérêt.Mais comme rien n'a été prouvé à ce jour,
Moore monte au créneau.D’où la crédibilité de son travail.
La contagion a affecté le monde de la
musique. La célèbre chanteuses Linda Ronstadt a vanté le mérite de ce
réalisateur. Elle a présenté Moore comme un grand patriote américain qui répand
la vérité. Elle lui dédia une chanson ’’Desperado’’.
Mais elle fut contrainte de quitter le lieu où elle se produisit devant 4500
personnes.
Enfin,
les cinéphiles marocains qui s’impatientent de voir ce documentaire n'ont qu’à
se convertir en internautes momentanément.Un simple clic les ferait introduire
dans l’univers de ce que l’on pourrait appeler Emile Zola du 7eart.
Son brûlot n’a-t-il pas eu le même retentissement que le "J’accuse"
dreyfusard, de l’auteur de ’’L’Assommoir’’
?
RAZAK
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