Thursday, April 27, 2006
UNANIMITE ?!
UNANIMITE ?!
« Sans la justice sociétale, les injustes deviennent des fauves lâchés dans la jungle urbaine. Sans la crédibilité, les éditeurs de journaux deviennent des vendeurs de papier ».
(Aphorisme inédit, RAZAK)
En matière de festival de cinéma, il faut se méfier des unanimités journalistiques autour des nouveaux-nés. Cet été au Maroc a vu l’éclosion d’une kyrielle notamment dans les villes côtières. Mais leur évaluation par la presse a souvent manqué d’objectivité .C’est plein de complaisance, trop voyeur et artificiel. Le journalisme critique semble en état de dormance jusqu’à nouvel réveil .Mais le propos stéréotypé est souvent l’émanation d’un intellect stéréotypé. De nos jours, pour lancer un festival de cinéma qui soit une réussite à tous les niveaux, il faudrait avoir de la probité angélique pour ne pas dire de la prophétie. Prenez n’importe quel festival mature comme ceux de Cannes, Venise, Berlin, Clermont-ferrand (court métrage) ou Espinho (CINANIMA) et examinez leur itinéraire en comptant les obstacles qu’ils ont dû surmonter et les réajustements opérés, d’édition en édition, avant de devenir des agoras de cosmopolitisme. Vous en déduirez des enseignements édifiants. L’auteur de cette modeste chronique a eu la chance de participer aux années 90 du siècle qui vient de nous quitter à un certain nombre de festivals européens dont notamment CINANIMA (Portugal) qui a comme créneau le cinéma d’animation .Il m’a été donné de constater de visu des écarts qualitatifs appréciables tant au niveau de la programmation qu’au niveau des conditions d’accueil .L’affabilité était le signe de civilité le plus saillant .Aussi , les médias audiovisuels ne sont pas comme les nôtres nombrilistes et gangrenés par le clientélisme. Ils donnent la parole même aux réfractaires, mus le plus souvent par un désir perfectionniste et non par une volonté de déconstruire ce qui est construit .Cela permet aux organisateurs de réparer les déficiences organisationnelles et peaufiner leur programmation. Quand une association à but lucratif ou non brille par son élitisme et son sectarisme cela se répercute sur les manifestations qu’elle organise. L’unanimité louangeuse vis à-vis d’un festival à peine enfanté et baptisé relève de l’ubuesque .Quelque part on a le sentiment qu’on a soudoyé les « véridiques » pour les aligner aux beni-oui-oui (goulou l’âme zine). Cette unanimité forcenée nuit à l’historicité de la chose. Elle inquiète plus qu’elle ne réconforte .Elle a pour gêne ADN la complaisance et elle incite à dormir sur ses lauriers, consacrer la stagnation et l’auto glorification .Heureusement, il y’a dans ce pays où le champs artistique n’est pas encore balisé (statut de l’artiste en léthargie) et où les techniciens ne sont pas appréciés à leur juste valeur, des journaux qui, se contentant de peu, savent se monter rigoriste et jaugeur. On les estime pour cette vigilance salutaire. Ils ne sont pas nombreux, mais une poignée d’abeilles comme dit le dicton est mieux qu’une nuée de mouches. Autrement, on aura dans la presse quotidienne un déluge d’articles complaisants où les ignares seraient présentés comme des génies et les unijambistes comme des héros. Ils seraient même plus nombreux que les créatures ailées du Pearl Harbour acridien dont l’Afrique du Nord est le champ de bataille. Il n’y’ a qu’à lire ce qui s’écrit comme mièvreries commanditées. Sans prétendre devenir un « festivalogue » ou un « Morchid Takafi » (orienteur culturel ) qui aime donner des leçons aux autres en oubliant de se les donner à soi même, j’ai remarqué qu’à l’instar des êtres humains, la vie d’un festival passe par trois stades : la naissance , la maturité et la déchéance . La période la plus difficile est celle de l ‘affirmation de soi. On parle alors de rythme de croisière quand le festival creuse son sillon, impose son label médiatique et fidélise une certaine clientèle. Le lexique définit le festival de cinéma comme « une manifestation périodique et temporaire consacrée à le projection de films » .Le côté mondain est indispensable. Mais il ne faut pas que cela devienne un congrès de dentistes comme dirait Godard. Les invités de marque, quand ils sont bien accueillis, ajoutent du prestige à la manifestation .Un festival de cinéma peut être national ou international, compétitif (prix) ou non compétitif .L’international est difficile à maîtriser car il exige des compétences très confirmées notamment en communication. Aussi, la thématisation ne doit pas se faire au détriment des nouveautés. Si le festival de Cannes a survécu aux aléas, c’est parce qu’on a opté pour l’inédit. Les rétrospectives lui servent d’ameublement .L’élément financier reste la clef de voûte comme dans n’importe quelle entreprise. Mais la transparence dans le gestion est une nécessité absolue .L’opinion publique doit savoir qui a fait quoi .Les chiffres de recettes du sponsoring doivent être communiquées à la presse, sinon les petits doutes finiront par devenir une entrave. La zizanie abrège l’existence des festivals. Il y ‘ a actuellement de par le monde une multitude de festivals qui ont vu leur longévité écourtée de manière prématurée à cause du manque de transparence ou de détournements de fonds. En effet, on dénombre plus de 1400 festivals de cinéma dans le monde. Mais lesquels méritent amplement leur nom ?
J’ai pris l’habitude de clore mon courrier par quelque chose de ludique afin de décompresser l’humeur. Je propose cette fois-ci une création qui a été déjà publiée dans un magazine parisien. Elle illustre de manière humoristique ce dont on a débattu avec un ton sérieux. J’espère qu’au delà du jeu de mots, on y trouve de quoi étancher sa curiosité.
UN FESTIVALIER AVERTI EN FESTIVAUT DEUX
Pour plus de crédibilité et de rayonnement, les organisateurs de festivals doivent redoubler de vigilance et de perspicacité, afin de présenter des choses « festivalables » .Il faut en outre se prémunir contre la « festivalite » aiguë, qui ajoute à l’art plus de snobisme quelle n’en retranche .La « festivalidité » d’une programmation dépend de sa « festivaleur » médiatique et de son « festi-impact » socioculturel. Or, ce n’est pas en « festivolant» les idées des autres que l’on gagnera des points au « festivalomètre » universel dont l’étalon devrait, en principe, se trouver chez les « festiveilleurs » de l’UNESCO, puisque l’art est à la fois un bien culturel et un outil éducatif. Un organisateur de festivals qui ne sait pas « festivaloriser » les talents et les compétences, en les présentant sur les meilleurs plateaux possibles, est un « festévaluateur » raté. Le mieux serait de rester aux aguets, sinon on n’a qu à faire ses « festivalises » .C’est la « festivérité », croyez-moi on pas. Enfin, si le succès est parfois synonyme de « festivouloir », le ratage, le bide et le flop sont souvent dus à l’improvisation et aux magouilles. Seule, la critique objective et incorruptible pourrait en déceler le fil invisible. La « festiactualité » est un atout et le « festiamateurisme » un handicap. Alors chers organisateurs de « festiactivités » estivales ou hivernales, évitez d’être des « festivauriens ».Un festivalier averti en « festivaut » deux.
« Festivalement » votre.
RAZAK
(Paru le 20 septembre 2004)
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