Thursday, May 11, 2006

Eisenstein et la magie du montage


Eisenstein et la magie du montage
« Le montage orthodoxe, écrivait le cinéaste et théoricien de cinéma Eisenstein est un montage selon des dominantes ; c'est à dire une combinaison de fragments entre eux, selon leur signe distinctif le plus marqué (principal). Un montage selon un temps, un montage selon une direction principale à l'intérieur d'un cadre, un montage selon les longueurs des fragments et un montage en fonction du premier plan ». L'auteur du "Le cuirassé Potemkine" ne fait jamais son travail à la hâte .Dans chaque fragment, il cherche à montrer les détails psychologiques des personnages en les insérant dans une harmonie visuelle. Les portions de bobines portent les nuances rythmiques et tonales de telle manière qu'elles créeraient d'autres lectures si on les intervertissait. Eisenstein parle souvent d' « extase créatrice » comme un art du métrage , c'est-à-dire du dosage métrique. Or selon lui raccourcir et couper n'exigent pas d'inspiration mais seulement de la technique et des connaissances .La touche artistique vient en agençant ces segments et en essayant de leur donner une direction où le visuel et le sonore épousent la même forme. Généralement un cinéphile moyen peut déceler les failles de montage quand celles-ci sont le résultat d’un chamboulement de fragments. Montage tonal, montage rythmique, montage métrique, montage harmonique , montage parallèle , tels sont les sortes de montages sur lesquels Eisenstein a insistés et qu'il a développés dans différents communications et écrits ayant valeur de document historique et scientifique pour le cinéma. Pour nos techniciens-monteurs et cinéastes en exercice on se demande s'ils en ont saisi la portée. On juxtapose n’importe comment et cette addition hétéroclite soustrait souvent à la fiction toute sa narrativité. Eisenstein avait raison de dire : « La juxtaposition de deux fragments de films ressemble plus à leur produit qu’à leur somme ».
RAZAK
(Paru dans la presse écrite le 2 janvier 1993)

NOTE DE LAUTEUR .Pour ceux qui ne connaissent pas ce grand expérimentateur de cinéma qu’on considère être à l’origine du montage parallèle (à ne pas confondre avec montage alterné) nous leur conseillerions vivement de voir : La grève (1924, 89 mn), Le cuirassé Potemkine (1925, 70 mn), Octobre (1927, 141 mn), Ivan le terrible (1946 , 190 mn) . Dans Octobre, par exemple Serguei Eisenstein parvient ,grâce à la magie du montage , à fabriquer artificiellement dans le récit filmique un tir à partir de deux séries de plans immobiles .

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