Sunday, May 14, 2006
Orson Welles le marocain
Orson Welles le marocain
Pourquoi Orson Welles avait- il présenté au 5eme festival de Cannes , son film Othello sous la nationalité marocaine , bien que la production soit franco-italienne ? Mieux renseigné que lui sur les enjeux d’une telle option , il ne fallait pas contrarier le grand maître .Une chose est presque sure l’auteur de Citizen Kane avait de la compassion pour le Maroc .A Essaouira, fief gnaoui, le célébrissime acteur-réalisateur avait trouvé la bonne inspiration pour son film (adapté du chef d’oeuvre shakespearien ) .Ainsi , en offrant au Maroc le Grand Prix de Cannes 1952 , Welles voulait témoigner d’un sentiment d’attachement à une terre qui ne l’a que trop ensorcelé. Plus qu’un geste symbolique, c’était un acte prémonitoire à l’indépendance du Maroc. N’oublions pas qu’on est en 1952 et que le pays est sous domination française et puis que les Arrêtés Résidentiels pleuvaient de toutes parts pour interdire aux marocains toutes activités cinématographiques .Le cinématographe était perçu par les colons comme une arme d’émancipation , d’où cette fébrile vigilance enveloppée de soupçons .L’artiste visionnaire ,en bon samaritain , faisait preuve d’une générosité inégalée en incarnant le rôle de porte-étendard.
Avec le recul , on s’aperçoit qu’on avait affaire à un chantre des peuples privés de leur liberté . Sinon, par quoi expliquer ce revirement "identitaire" qui, à l’origine, avait surpris plus d’un observateur ? Seuls , les plus subtiles en savaient le secret . Welles avait sa manière à lui d’exprimer son affection. Malheureusement ce geste noblement réfléchi n’a pas été apprécié à sa juste valeur par l’élite marocaine .Welles "le marocain" méritait d’être honoré de la plus belle manière qui soit, comme il avait honoré le Maroc. Pas la moindre rue ne porte son nom.Pas le moindre timbre postal n’est émis à son effigie .Pire, on se demande toujours si à la Cinémathèque Nationale on dispose d’une copie du film-document Othello . Une cinémathèque sans sans cette pièce maîtresse, on n’en verrait pas l’utilité publique. Rendons à Welles ce qui lui revient . Comment ne pas être pétri d’admiration pour ce géant qui aime la simplicité .N’était-il pas le cinéma en mouvement ?
RAZAK
(Paru dans la presse écrite le 22 mai 1999)
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