Wednesday, May 17, 2006

Hommage belge à Pholan Devi




HOMMAGE BELGE A PHOOLAN DEVI
DU 24 OCTOBRE AU 6 NOVEMBRE 2001 S’EST TENU A BRUXELLES LE FESTIVAL DU CINEMA DES LIBERTES. PARMI LES FILMS PRESENTES SOUS LE THEME : « FEMMES A L’ECRAN » BANDIT QUEEN DE SHEKAR KAPUR ALIMENTE TOUJOURS LE DEBAT DE BIEN ORIGINALES FACONS. CHRONIQUE DE VISION REDIGEE IN SITU.
Ceinte de son inséparable bandeau rouge , chevauchant la cartouchière garnie de balles et le fusil sur l’épaule, Phoolan Devi ressemble à un guérillero mexicain des années 1920 .Cheveux en l’air , le regard menaçant et le teint basané , il ne lui manque que le sombrero pour une Zapata à l’indienne .Elle a dû subir de bien atroces tourments pour en arriver là. Née en 1957 dans un petit village de l’Uttar Pradesh, elle a eu une enfance mouvementée, marquée de bout en bout, par la violence. Phoolan Devi est la deuxième fille d’une famille de déshérités qui appartient à la basse caste des Mallahs .Vivant comme des bohémiens, ils ne voient dans la naissance d’une fille que problèmes et bouche à nourrir .Chez ces gens là, seuls les garçons jouissaient des rites de célébration à leur naissance. En 1974 , son père la vend à un homme beaucoup plus âgé qu’elle . Il l’exploite inhumainement .Ne pouvant plus supporter le calvaire, elle s’enfuit. Comme elle défiait son cousin , celui-ci la fait arrêter. Elle est violée par les geôliers de la prison .Une bande de brigands (Dacoits ) l’enlèvent de ce lieu d’incarcération et l’adoptent .Et comme la guerre des castes fait rage , elle tombe dans les mains des adversaires Thakurs qui la paradent nue dans les villages .Ainsi, de sévices en sévices , la femme en devient une autre .
« Elle s’est laissée submerger d’une révolte et d’une soif de vengeance insatiable », disait d’elle une ethnologue émue par le sort tragique de cette femme singulière devenue par la force des choses, une figure charismatique de l’Inde .Elle décide de ne plus faire la victime muette qui encaisse les coups. Elle extériorise sa haine .Aux armes citoyennes indiennes. De toutes les humiliations subies, la plus abominable pour elle, fut le viol collectif .Elle n’oublierait jamais ce calvaire d’une cruauté indicible .C’est pour cela qu’elle avait juré de se venger de tous ceux qui ont participé à cette sauvagerie .Pour se faire justice, elle durcit les biceps el le cœur dans le brigandage .Elle forme son propre gang et mène des attaques bien ciblées. Le film de Shekar Kapur en relate des bribes. Mais il reste superficiel quant à la manière de narrer la vie rocambolesque de Devi . Rappelons qu’une polémique a été déclenchée dès la sortie du film en 1995. Phoolan Devi, s’estimant lésée, dut ester en justice contre le réalisateur .Une intellectuelle Susanna Arundharti Roy prit le défense de Phoolan Devi. Elle déclara devant la Cour de Justice que « nul n’a le droit de présenter au cinéma une scène de viol sans l’accord de la protagoniste concernée » .Elle dénonça l’exploitation des malheurs de cette femme dans un but purement commercial .Mais malgré ce différent et malgré la légèreté de certaines scènes du film, ainsi que ses nombreuses exagérations scénaristiques , la légende Phoolan Devi dite la « Reine des Bandits » doit son ancrage médiatique plus au film de Kapur qu’ aux nombreux ouvrages qui lui ont été consacrés. Bien que le livre que Irene Frain a rédigé à partir des confidence de la prisonnière ait eu beaucoup de retentissement .Mais la puissance de l’image est incontournable et indiscutable .L’autre virage de la vie de Phoolan Devi, est sa spectaculaire sédition de 1983 .Elle se rend aux autorités judiciaires après avoir semé la terreur dans la région. Elle passe onze ans en prison. Elle y perd ses ovaires, donc son aptitude innée à procréer .Certains voyaient en elle une martyre vivante .Un symbole de résistance contre l’abus du féminin par le masculin .Dès sa sortie de prison en 1994, elle est déjà célèbre et la presse ne parle que d’elle. La politique la tente .Elle voulait changer le monde après avoir été acculée à le subir. Ainsi sous les couleurs du parti Yadav (parti socialiste) elle présenta sa candidature .Elle brigue un premier mandat de député .Elle perd son siège en 1998, mais elle le retrouve l’année suivante. Au parlement, l’essentiel de ses interventions était consacré à la défense des opprimés et des laissés pour compte. Devi serait même allée jusqu’à proposer sa candidature au prix Nobel .La respectabilité acquise , elle s’apprêtait à mener d’autres combats sur d’autres fronts lorsque , au seuil de sa résidence officielle de New Delhi , des tireurs inconnus vidèrent sur elle la charge de leur revolver .Cela se passait le 25 juillet 2001.Dans son hommage, le président K.R Narayanan a dit de cet amazone rebelle qui s’est battue jusqu'au bout pour sa dignité : « Sa vie était une histoire de rébellion et de défi réussi , devant l’oppression et l’exploitation » . Apres sa mort, les contes fleuriront .Et comme on est au royaume des légendes et des fables, Phoolan Devi serait un jour ressuscitée par l’écrit, le son et le mime telle une divinité guerrière des temps immémoriaux .Quand à Shekar Kapur, une suite du film Bandit Queen apparaît comme une nécessité pour percer le mystère de ce lâche assassinat et monter l’autre facette de Phoolan Devi concernant sa vie parlementaire, ses réalisations sociales, son combat de femme réhabilitée. Pourvue que l’objectivité scénaristique soit alliée à l’art de narrer.

RAZAK , Bruxelles : le 1 novembre 2001.
(Paru dans la presse écrite le 10 novembre 2001)
NOTE DE LAUTEUR : La suite de Bandit Queen n’a pas eu lieu . Le mystère de cet assassinat reste entier. Après La Reine des Bandits, Shekar Kapur a réalisé Elizabeth (1999) et Frères du Désert (2003).Il a aussi produit Le Gourou et Les Femmes (2003). Il est un des réalisateurs indiens les plus occidentalisés
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